Pour ce deuxième soir, la programmation monte d’un cran et laisse entrevoir quelques bons moments. En attendant, The 1945 accompagne gentiment l’apéritif. Un groupe qui entame son set par "Jumpin’ Jack Flash", forcément ça fait un peu balloche de campagne. La chemise du chanteur est à l’unisson, c’est fleuri et coloré mais ces trente minutes de rock énergique ne vont pas changer la face du monde.
J’enchaîne donc avec Atom Rhumba qui ont les honneurs de la grande scène. Ce combo basque est nettement plus intéressant, avec une section rythmique efficace et un saxophone omniprésent ; ils offrent un concert brut et festif, aux influences 70’s bien marquées.
Je n’ai pas fait les comptes mais j’ai la sensation que le nombre de formations Espagnoles est en nette progression cette année, même si elles sont concentrées majoritairement sur les débuts de soirée.
Poursuite de la découverte avec Ainara Legardon. Parfaitement inconnue au bataillon (en ce qui me concerne en tous cas), la Basque a longtemps officié en tant que chanteuse dans le groupe Espagnol Onion (original comme nom ! Qui a parlé de soupe ?) avant de se lancer en solo à partir de 2003. Autant dire que la demoiselle n’est pas tombée du nid et possède déjà une bonne expérience de la scène ; son dernier album We Once Wished se révèle être une petite bombe, à mi-chemin entre les guitares énervées de Kristin Hersh et ses 50 Foot Wave et la tension de PJ Harvey. La prestation du groupe est impressionnante et dégage une saine (syn)énergie, à l’image du batteur, à l’affût du moindre signe de la chanteuse, voué à sa cause et prêt à dégainer dès que nécessaire. En gros, ils prennent un pied palpable et c’est réciproque !
Rapide écoute de quelques titres de The Marzipan Man : le groupe mené par la voix aiguë et particulière de Jordi Herrera a été révélé en 2007 par le magnifique "Sometimes" et son clip délirant. C’est justement ce titre qui m’accueille lorsque j’atteins la scène Fib Club. La version est superbe et émouvante.
La suite est plus anodine et je préfère aller jeter une oreille sur The Paris Riots, déjà entendus l’an passé. Et c’est justement là que le bât blesse… C’est curieux cette tendance de réinviter des groupes d’une année sur l’autre quand on a la forte impression qu’ils n’ont pas grand-chose de neuf à proposer. Certes, le groupe a sorti un EP en 2011 mais la plupart des titres avaient déjà été joués l’année précédente ; en gros, c’est un peu le même concert, à part qu’ils ont dégringolé d’une scène (ils avaient eu les honneurs de la Verde, aujourd’hui c’est la FiberFib… c’est plutôt l’inverse d’habitude !). Alors oui, les riffs sont toujours efficaces, oui "Wrecking Ball" est un chouette titre qui reste dans la tête. Mais le tout n’a rien d’innovant et ça commence à sentir le réchauffé. Vont-il finir sous le chapiteau l’an prochain ? (Oups, voilà que j’apprends qu’ils ont joué sur la micro scène Jack Daniel la veille…). The Paris Riots au camping en 2012 ?
Trêve de plaisanterie, c’est sans conviction que je rejoins la grande scène où se produit Brandon Flowers, échappé de ses Killers. J’ai gardé en mémoire la prestation pompeuse et interminable de ces derniers ici même en 2009. Voilà donc Brandon en version solo ; et je dois reconnaitre que certes c’est archi convenu et dégoulinant façon Mercury Rev de ces dernières années (on a droit à une reprise sans grand intérêt du "Bette Davis Eyes" de Kim Carnes), certes il en fait des tonnes dans son petit boléro propret (il se rapproche dangereusement de Robbie Williams), mais ça reste quand même un sacré compositeur et les mélodies finissent par me retourner comme une crêpe et je me surprends à taper du pied sur le sautillant "Only the Young" qui me happe au moment où je quitte le site pour me diriger vers Herman Dune, un des rares groupes Français invités cette année. Très décontractés et chaleureux, ils vont nous proposer un set "vrai", intime, très folk, à l’image de leur dernier album Strange Moosic. On lorgne du côté des Mountain Goats et l’ambiance est radicalement différente du concert précédent ! On passe d’hymnes stadiers à des chansons douces de feux de camp, un soir d’été sous la pleine lune. Un vrai régal !
C’est donc l’esprit apaisé que je me dirige à grands pas vers la scène Fib Club pour assister à la performance d’Art Brut. Car on peut parler de performance tant les prestations scéniques du groupe, et surtout de son leader pince sans rire Eddie Argos sont toujours un grand moment de rigolade !
Et ça commence très fort dès l’entrée sur scène par un "Hello, we are The Morning Benders" revanchard ! Art Brut supplée en effet ces derniers, initialement prévus… de quoi dérouter le quidam. Après le classique et musclé "Formed a Band" en guise d’introduction, Eddie comme à son habitude va beaucoup communiquer avec le public. Et derrière l’ironie, on sent bien que perce une certaine aigreur : il parle ainsi d’une personne les ayant congratulés au sujet de leur reformation "mais nous n’avons jamais arrêté, c’est vous le public et les médias qui êtes partis !". Il est vrai que le groupe après un (surprenant) démarrage sur les chapeaux de roue a un peu disparu de la scène musicale, malgré le très bon Brilliant Tragic ! sorti cette année sous la houlette de Frank Black, rien que ça (d’ailleurs, Eddie n’a manifestement pas pris que des conseils vocaux auprès de l’ancien Pixies, mais également une bonne dizaine de kilos !). Pour info, il nous donne des nouvelles de son Little Brother précisant qu’il poursuit finalement des études de médecine et que c’est plutôt lui-même désormais qui inquiète ses parents !
Côté musique, puisque nous sommes aussi là pour ça, le groupe a sacrément durci son jeu et ne fait pas dans la finesse, si bien qu’on a du mal à percevoir les textes. Le dernier album est bien représenté et Eddie s’offre un petit voyage (hilarant) dans le public sur fond de "oups, je n’aurais pas dû, non ne tirez pas s’il vous plait, pas par là…". Du grand spectacle !
Ce n’est pas tout çà, mais l’heure du concert tant attendu des Strokes approche. Après une traversée du site en mode survie, je parviens à me réfugier dans la tribune de presse (salvatrice, il faut le reconnaitre). La foule est réellement compacte, survoltée et c’est impressionnant, voire inquiétant. La tension est à son comble et est savamment entretenue par l’arrivée sur scène tardive du groupe. Ca démarre fort, avec deux titres du premier album ("New York City Cops" et "Alone Together") à la plus grande joie de la foule. Le son est bon, le chant à la hauteur. Tous les éléments sont réunis pour assister à un concert mémorable.
Et pourtant… de mon point de vue (aux deux sens du terme, ma localisation dans les gradins enlevant un peu de l’ambiance), c’est raté. Le groupe fait le boulot avec un degré zéro d’émotion… et ça se ressent vraiment. Absence complète de communication à la fois entre eux mais surtout avec le public. Ca sent vraiment le sapin entre Julian et ses comparses qui ne décrochent pas un sourire. Dur métier…
Après avoir boudé les balances le matin même, il ne semble plus partager grand-chose avec eux, à part un bout de scène. C’est bien dommage car malgré l’efficacité et le plaisir pris à entendre des titres comme "Hard to Explain" ou "Is This It", l’atmosphère tendue plombe l’ambiance. Les morceaux explorent majoritairement le premier et le dernier opus, First Impressions of Earth étant quasiment ignoré (on n’aura d’ailleurs étonnamment pas droit non plus à "The End Has No End").
Le public en transe en redemande pourtant… Une bonne vingtaine de titres et puis le groupe quitte la scène comme il était venu, sans un mot ou presque (je ne compte pas les trois mots d’Espagnol de Julian Casablancas) avec la sensation du devoir accompli. De mon côté, c’est vraiment une grosse déception et je commence à douter que le plaisir vienne cette année des grosses têtes d’affiche.
Un peu assommé, je fais l’effort d’aller jeter une oreille sur James Murphy, mais privé de ses comparses de LCD Soundsystem, c’est en version Dj Set qu’il se présente et ce n’est pas trop de mon goût. A court d’énergie et désabusé par les Strokes, je fais l’impasse sur Friendly Fires et part m’écrouler sur mon matelas en attendant des jours meilleurs. |