Monologue dramatique d'après l'oeuvre éponyme de Louis-Ferdinand Céline, interprété par Eric Sanson dans une mise en scène de Renaud Cojo.
Qui d'autre que Céline mêle à ce point l'ordure et le sublime ? Dans "Mort à crédit" l'écrivain revisite son enfance, ses parents et la vie du passage, son séjour en Angleterre, son emploi improbable chez un fou : le flamboyant Courtial des Pereires, directeur du "Génitron", périodique des inventeurs qui viennent confier leurs rêves délirants, caressant l'espoir d'une reconnaissance qui se dérobe sous leurs pas.
Eric Sanson interprète Céline, confondant ses traits et son humeur sarcastique avec ceux du reclus de Meudon. Le récit qu'il nous propose d'un souffle, d'une traite est en lui-même un feu d'artifice : la rencontre de Ferdinand et de Courtial.
Le metteur en scène Renaud Cojo n'a pas choisi de grands effets : un vieux fauteuil, une bassine sont les accessoires qui racontent l'homme seul qui magnifie ses souvenirs grâce à la vigueur de la langue et un lexique qui dépasse les limites de sa chambre.
Il fait réapparaître Courtial, si anachronique, les pieds dans la boue et la tête dans les galaxies. Lui qui n'aime qu'à prendre son envol dans un ballon à la toile mitée. Ferdinand a beau aimer ce vieux manipulateur au point de repriser sa toile avec soin et de s'inquiéter de ses délires d'enfouissement. La page n'est pas loin d'être tournée.
Qui est le manipulateur, qui est celui qui tricote un ballon dans la trame toute décomposée de la langue? Si ce n'est ce Ferdinand Destouches devenu écrivain.
Eric Sanson ne cache pas sa jubilation et son goût pour la saveur salée de la vision célinienne. Une expérience qu'il fait partager avec bonheur comme si on était venu lui rendre visite et qu'une intimité bienveillante s'était installée. |