La
Galerie nationale du Jeu de Paume accueille une rétrospective
du photographe Guy Bourdin qui fût l'un des photographes les
plus novateurs du siècle dernier.
Elle présente, majoritairement, ses créations photographiques
liées à l’univers de la mode. Deux films et
une section de polaroids réalisés parallèlement
à ses travaux de commande.
Enfin, une partie de photographies noir et blanc (paysages et abstractions),
antérieure à ses créations de mode, vient clore
l’exposition.
SophieD et P.L sortent de l’exposition :
SophieD : Alors… t’en as pensé quoi ?
P.L : Franchement… Bien good bien good… ça
m’a plu, ça m’accroche et toi ?
SophieD : Eh bien, je m’interroge, disons que je trouve l’esthétique
un peu vieillotte, surtout pour des images de mode. Elle te plaisent
toi la mise en scène et la lumière ?
P.L : Je t’avoue que justement, c’est cette esthétique
années 70-80 qui me plaît vraiment ! Haut en couleur.
Certes certaines images font un peu "passées",
les effets du "make up", les vêtements… mais
au final, je ne trouve pas que les critères de la photo de
mode actuelle aient changés. Concernant la mise en scène
j’ai la sensation de voir du Newton dans ses photos (quand
ce n’est pas mon reflet que je vois dans le cadre à
cause de l’éclairage pas top….)
SophieD : C’est vrai, tu n’as pas tort, sa série
pour la campagne de pub Charles Jourdan n’est pas différente
de ce que fait la marque aujourd’hui en matière de
stratégie publicitaire. De plus, avec l’aspect rétro
qui revient à la mode de façon cyclique, ses photos
conviendraient certainement au magazine Elle de cette semaine.
P.L : Je suis relativement peu introduit dans la photographie de
mode, et connaît mal ses codes et ses modes, mais cette esthétique
me plaît vraiment, pour son côté plastique, sans
y chercher une démarche globale. Je regarde chaque image
séparément, même si un style très identifiable
émerge forcément sur l’ensemble. Chaque image
raconte sa petite histoire. Chaque image laisse la possibilité
de se raconter son histoire, ou non, de creuser, ou non, ou juste
d’aimer sans vouloir trop expliquer… SophieD (me coupe
brusquement !!!) : Le problème pour moi est que l’on
arrive pas au travers de toutes ces commandes à capter l’essence
même de sa démarche artistique. Sauf peut-être
dans les photos noir et blanc et les polaroids exposés un
peu tels une annexe. Problème : je n’ai pas trouvé
cette partie de l’exposition intéressante….
P.L : Idem, ce qui aurait pu renseigner sur le personnage Guy Bourdin
hors de son travail de commandes, renforce la sensation d’énigme
pour moi… et confère à cette annexe son caractère
plutôt anecdotique… Et que dire des deux films ? Effet
de mode un peu contemporain ou réel intérêt
documentaire ? Moi je les ai trouvés nuls. SophieD : Bon,
soyons honnête, on a tout de même aimé quelques
photos, celle avec l’avion qui décolle (ou atterrit…)
au dessus de la voiture et moi celle avec les deux filles dans la
salle de bain, en train de se préparer.
P.L (qui coupe Sophie !) : hééé je les aime
toutes les photos moi !!!
SophieD (qui reprend) : ok ok mais t’as vraiment flashé
sur celle-ci… D’ailleurs sur la photo des deux filles
qui se préparent (rendue anonyme pas le cadrage sur les bustes
uniquement), nos ressentis sur l’image diffèrent. Tu
y as vu le contact des chairs et l’aspect érotique,
sensuel, le tout conférant un caractère excitant,
tandis que j’y ai vu une scène intime et d’amitié
entre deux filles qui se préparent, tout simplement…
Selon que l’on est homme ou femme, l’exposition peut
être perçue différemment.
P.L : Oui, en effet, c’est intéressant d’avoir
un avis féminin, d’autant que la grosse majorité
des images ici présentes était destinée à
un public féminin… Mais en fait, je ne te cache pas
que ce qui me plaît aussi dans ces photos, outre les visuels
colorés et funky, les cadrages "originaux", c’est
la femme, ses pieds, ses chaussures… toute cette imagerie
est assez excitante je trouve. Toi, tu en penses quoi de la façon
avec laquelle les femmes sont représentées ?
SophieD : A aucun moment Guy Bourdin ne montre une image dégradante
de la femme à mon sens. Cela dit, je trouve qu’il n’exalte
pas, comme l’a fait Newton (Helmut), la beauté féminine.
Quelques photos mettent en scène des femmes de manière
un peu primaire (celle où elles mangent de la choucroute
en se saisissant à pleine bouche de saucisse sans l’aide
des mains…)
P.L : Ouais… m’enfin dans le genre, la photo de Newton
des mains de femme aisée (grosses bagouses aux doigts) qui
dépècent à main nue le poulet, ou encore celle
de la femme à quatre pattes avec une selle sur le dos, ne
sont pas mal non plus….
Cela dit, avec le recul, j’ai plus l’impression d’avoir
vu chez Bourdin des jeunes filles, créant parfois une légère
sensation de malaise. Suis-je en droit de "fantasme" sur
elles ? Ce qui n’est pas le cas chez Newton, où je
sens plus de maturité, voire de dureté dans sa représentation
des femmes. D’ailleurs Bourdin aréalisé plusieurs
photos avec des modèles enfants sur-maquillés tels
des femmes adultes. Auto-critique ?
Finalement, j’ai la sensation d’une œuvre moins
dense que celle de Newton (la comparaison récursive avec
Newton est logique, sachant qu’ils se sont partagés
la vedette dans les pages de Vogue…), c’est pourquoi
j’aime les images de Bourdin plutôt isolément,
les considérer seules à seules. Sans doute que je
n’ai pas le recul suffisant sur son travail….
SophieD : Oui mais… ses photos de mode, n’étaient
pas simplement faites pour être vues seules à seules,
elles constituaient une série publiée dans Vogue.
Elles fonctionnent par série, bien qu’elles soient
isolées dans le cadre de l’exposition. Finalement tenter
de les analyser est difficile car elles doivent être vues
rapidement, l’histoire se déroule à la vitesse
de la lecture d’un magazine.
P.L : Oui en effet, c’est sûrement ce qui explique
pourquoi j’ai la sensation que l’on peut aimer la photo,
comme ça, telle quelle, ou bien alors s’y attarder
plus longuement. Leurs qualités, résident aussi certainement
dans la faculté qu’elles possèdent à
sembler aisées d’accès, simples à apprécier,
et à la fois capable de faire s’attarder le lecteur
pour se raconter une histoire, approfondir…
Cette exposition constitue un peu une redécouverte de l’artiste
et surtout une volonté de l’inscrire à présent
dans l’histoire de la photographie. Faudra que je revienne
sur ses images…
Bon on va manger ?
SophieD : Ok !
P.L : Tiens ! Voilà du Bourdin! (rires……….)
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