Alexandre
Lacouture est le jeune auteur de la pièce "Call me call
girl" actuellement à l'affiche du Théâtre
des 3 bornes. Enfin, quand même quelques années de
plus que sur cette photo ...mais si peu... et le même sourire.
Il enchaîne pièce sur pièce avec talent et
une volonté tenace et réaliste. Enfant de la télé
et des sitcoms, il flaire l'air du temps et ambitionne de dépoussiérer
le théâtre conventionnel.
Nous l'avons rencontré pour qu'il nous dévoile un
peu ce qui se cache derrière ce regard déterminé.
Comment êtes-vous venu au théâtre
et à l’écriture ?
Alexandre Lacouture : Cela fait à peine
2 ans que je travaille dans le théâtre. J’avais
pris quelques cours de théâtre en amateur et un jour
avec un camarade, Vincent Duquesne, nous avons décidé
d’écrire une pièce qui s’est appelée
"Le sofa de Sofie". De fil en aiguille, nous avons réussi
à monter une équipe pour jouer cette pièce.
Des divergences artistiques nous ont conduit à monter chacun
notre version de la pièce. J’ai donc monté "Le
sofa de Sofie V2" qui est basée sur la même trame
mais qui comporte un personnage de moins et quelques développements
supplémentaires. Grâce aux comédiens qui ont
accepté les rôles, j’ai réussi à
professionnaliser mon projet et nous avons pu jouer à l’Aktéon.
La pièce a bien marché et puis nous l’avons
reprises au Mélo d’Amélie où elle a bien
moins marché. C’était plutôt un beau succès
d’été. Nous avons fait 74 représentations.
Quelle est la genèse de "Call me call
girl" ?
Alexandre Lacouture : Immédiatement après"
Le sofa de Sofie", j’ai enchaîné sur l’écriture
de ma seconde pièce qui s’appelait à l’origine
"L’incroyable aventure de Mattéo Rimet",
un titre peu évocateur et trop long. J’ai de nouveau
monté une équipe en recherchant les comédiens
via internet sur des sites de casting tels que Casting surf, Casting
system et surtout le pont des artistes qui malheureusement n’existe
plus. J’ai donc rencontré des comédiens, organisé
des auditions, fait la mise en scène et nous avons joué
au café-théâtre Le bout.
Grâce à Alexandre Delimoges ce théâtre
est un formidable tremplin pour les jeunes. La pièce a reçu
un très bon accueil ce qui nous a permis de réinvestir
les bénéfices pour présenter la pièce
dans un théâtre plus grand. Nous avons fait 3 show-case
au Théâtre Galabru. Nous avions invité Alain
Miro de Staff Productions et Michel Salardenne le directeur du Théâtre
des 3 bornes. Alain Miro a souhaité que la mise en scène
soit revue par un metteur en scène professionnel et c’est
donc Isabelle Legueurlier qui a assuré la mise en scène
du spectacle. Actuellement Paul Séré est le seul comédien
qui faisait partie de la première distribution, les autres
ayant d’autres engagements.
Vous aviez dès l’origine l’intention
de devenir un professionnel du théâtre ?
Alexandre Lacouture : Au début, c’était
plutôt une gageure. Devant le succès rencontré,
car nous avons eu la chance du débutant, j’ai continué.
D’autant que quand j’ai redémarré, en
quelque sorte, en solo, j’ai eu la chance de rencontrer des
comédiens professionnels qui m’ont permis de progresser
dans ce métier et de faire les rencontres qui sont indispensables
dans ce métier.
Cependant au début, vous vous êtes
néanmoins investi à fond dans ce projet ?
Alexandre Lacouture : Oui. Et puis pour ma seconde
pièce, je bénéficiais déjà de
l’expérience acquise lors de la première.
Les deux pièces sont de la même veine
?
Alexandre Lacouture : Non." Le sofa de Sofie"
s’apparente davantage à un sitcom transposé
au théâtre. C’est une pièce plus bon enfant
avec moins de rebondissements.
Dans vos notes d’auteur vous écrivez
:" Faire du neuf avec du vieux". Pensez-vous que tout
à déjà été écrit en matière
théâtrale ?
Alexandre Lacouture : Mes références
sont, malheureusement, plus télévisuelles que théâtrales.
Les sitcoms s’apparentent à du théâtre
mis en images. Ainsi un des premiers sitcoms français Maguy
était interprété par des comédiens de
théâtre. Je suis bien sûr influencé par
des sitcoms américains comme Parker Lewis qui sont créatives
et inventives. Et puis je voulais me démarquer du théâtre
pas par vanité mais par envie.
Que vouliez-vous faire avec "Call me call
girl" ?
Alexandre Lacouture : En premier lieu, je voulais
éviter toutes les faiblesses de la première pièce
qui comportait une trame très légère. J’ai
donc voulu écrire une comédie pleine de rebondissements,
d’histoires imbriquées, avec de nombreux personnages,
pas forcément présents sur scène, des effets
et surtout une écriture un peu plus pointue.
Quel a été l’apport d’Isabelle
Le gueurlier ?
Alexandre Lacouture : Elle a fait un gros travail
en termes d’encadrement et de direction d’acteurs car
ma mise en scène initiale était faite de bric et de
broc et nous démarrions avec de jeunes comédiens.
Elle a également su trouver une dynamique en terme de rythme
pour que le spectacle soit homogène sans baisse de régime.
De plus, elle est très ouverte aux attentes des autres car
elle arrivée sur un projet qui était déjà
formé.
La pièce a-t-elle connue des remaniements
du fait justement qu’elle a été reprise et ce
avec une autre distribution et un autre metteur en scène
?
Alexandre Lacouture : Oui. Enormément. A
peu près 30 % du texte a été ajouté
après les premières répétitions. Cela
concernait surtout les développements de l’histoire,
l’épisode sur la révélation divine. Et
puis il y a eu que quelques réajustements pour tenir compte
de la nouvelle distribution. Cela étant c’est une pièce
dont la structure permet des ajouts, par exemple dans l’hypothèse
d’un format plus long que celui d’une pièce de
café-théâtre.
Et la référence à Tarentino
?
Alexandre Lacouture : C’était pour
le gag bien sûr mais aussi parce que j’apprécie
beaucoup son travail. Quand on voit "Kill Bill" ou même
"Pulp Fiction", on constate qu’il se permet tout,
même de reprendre ce qui a déjà été
fait tout en créant une œuvre très personnelle.
Il a cette audace. Dans la pièce, j’avais envie d’insérer
des flash-backs pendant lesquels il ne se passe rien, le tout se
recoupant et prenant un sens lors du dénouement. Cela étant,
je ne peux pas vraiment me permettre cette démarche.
Quelle est la programmation prévue pour
"Call me call girl" ?
Alexandre Lacouture : La programmation initiale
au Théâtre des 3 bornes est prévue jusqu'au
11 septembre. Nous attendons les quinze prochains jours pour voir
si des prolongations sont envisageables.
Pour le moment, alors que nous sommes en pleine
période de vacances estivales, le public est au rendez-vous.
Avez-vous démarché d’autres salles éventuellement
plus grandes ?
Alexandre Lacouture : Pour le moment je me consacre
à l’écriture. Je laisse le soin au producteur
de planifier la programmation de la pièce. Je donne mon avis
bien évidemment mais la décision est prise par le
producteur.
Quels sont vos projets d’écriture
?
Alexandre Lacouture : Je suis actuellement dans
la phase d’écriture d’une comédie romantique
dans la veine de "Love actually" de Richard Curtis. Il
s’agira donc d’histoires d’amours croisées
sur fond d’humour anglais, un peu décalé. Le
titre provisoire est "Urban romance". Par ailleurs, je
prends le contrepied de "Call me call girl" dans laquelle
il y avait une abondance d’histoires, beaucoup d’effets
sonores et 4 comédiens. Il n’y aura que 2 comédiens,
peu d’accessoires, et les dialogues seront davantage calqués
sur ceux de la vie ordinaire.
Et puis il y a un one man pour Paul Séré
qui est en cours d'écriture. Il sera écrit par Paul,
Fréderic Tes et moi-même. Cela s'appelle "Comment
je suis devenu grand". C'est l'histoire d'un comédien
qui explique pourquoi il est devenu comédien. C'est à
cause d'une fille à l'école maternelle, et tout le
long de sa vie cela le motive pour réussir dans sa profession
de comédien...
Pensez-vous que ce genre d’histoires et
d’humour puissent intéresser le public français
?
Alexandre Lacouture : Au début, je suis
allé voir "Love actually" un peu à reculons.
Et puis je me suis rendu compte que ce n’était pas
du tout culcul la praline. Les personnages sont attachants et on
a envie de croire à ces histoires même si elles sont
peu réalistes. J’ai envie de travailler dans ce registre.
Toujours la comédie néanmoins ?
Alexandre Lacouture : Oui mais moins dans l’éclat
de rire.
Quels sont les auteurs dramatiques que vous appréciez
?
Alexandre Lacouture : Comme toute la génération
des moins de 30 ans, je suis sensible au jeu des comédiens
et aux dialogues des séries télé comme Friends.
C’est original et efficace.
Avez-vous le sentiment ou la volonté d’écrire
pour une certaine catégorie de public ? de cibler en quelque
sorte votre public ?
Alexandre Lacouture : Pas spécialement
de catégories d'âges mais une catégorie de personne
: les personnes qui ont une image du théâtre un peu
"ringard" (les piéces de Georges Beller et autres
etc...), je veux leur montrer que d'autres genres de pièces
existent ("J'aime beaucoup ce que vous faites", "Le
Carton", "Cyrano 2", etc...) plus modernes et dans
l'air du temps.
Dans call me call girl vous avez écrit
des dialogues qui sont percutants. Comment éprouvez l’efficacité
de ces dialogues ?
Alexandre Lacouture : En fait, j’écris
séparément l’histoire et les parties drôles.
Ensuite, j’insère les blagues dans l’histoire
et je remanie l’ensemble.
Quel enseignement tirez-vous pour le moment de
vos débuts dans ce métier ?
Alexandre Lacouture : D’une part qu’il
est toujours possible de monter un projet dès lors qu’on
est tenace et surtout réaliste. Débuter n’est
pas aisé mais il ne faut pas croire que toutes les portes
vont s’ouvrir facilement alors que vous êtes totalement
inconnu. De plus, il ne faut pas être ni trop ambitieux ni
trop exigeant en pensant par exemple pouvoir jouer immédiatement
dans de grandes salles et toucher des cachets prestigieux en sachant
que nous n’exerçons pas des métiers de salariés.
Et puis, je crois que les projets qui aboutissent sont rarement
ceux d’un homme seul. Ce sont des projets d’une équipe
comme par exemple celle des pièces "Le carton"
ou "La mère juive".
D’autre part, je voudrais remercier les personnes
qui m’ont aidé comme le directeur du café-théâtre
Le Bout, Alexandre Delimoges qui m’a répondu sur le
net quand j’ai posté sur des forums pour savoir comment
faire jouer ma pièce et qui m’a donné la chance
de pouvoir jouer dans sa salle dans des conditions financières
abordables.
De même je voudrais remercier Michel Salardenne
de la confiance qu’il m’a témoigné en
acceptant de programmer la pièce et mon producteur qui a
pris les risques financiers. Et puis les comédiens de la
première distribution qui ont essuyé les plâtres
et participé au projet alors qu’il n’était
encore soutenu par personne : Marc Lamigeon, Hélène
Liber, Marie Monziols et Paul Séré. Je regrette de
n’avoir pas pu mener au bout le projet avec eux.
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