J’ai fait un test : qu’évoque l’Italie pour mon entourage ? J’ai eu moult réponses : bunga-bunga, mozzarella, Maserati, Valentino, Borgia… Merci chaîne cryptée, j’ai cru que je n’y arriverai pas. Oui, parce que c’est de ça dont je vais vous parler à présent, les Borgia. Non, pas vraiment moi, je vais seulement vous parler de ce que Sara Poole aime depuis qu’elle a décidé de se lancer dans l’écriture de romans historiques : l’Italie de la Renaissance et la famille Borgia.
Petit voyage dans le temps : oubliez la criiiiiise et Berlusconi. Coulez-vous doucement du côté du Vatican, de Rome, oubliez la papamobile, vous voilà presque arrivés. Tournez par là, voilà, vous y êtes, pile-poil : les Borgia ! Cette famille de papes, de pères en fils, usant de guerre et de poisons pour s’imposer à la tête de l’Eglise Catholique (et de ses luxueuses demeures, de ses brillantes richesses culinaires et pécuniaires !), dont la célèbre chaîne cryptée diffuse une reconstitution actuellement.
Sara Poole s’est intéressée aux débuts des Borgia, quand Innocent VIII était encore au "pouvoir" mais vieux, sénile, buvant du sang et tétant des jeunes mamans pour rester jeune (je vous avais dit d’oublier les soins collagènes et le Q10+ de l’Oréal, les amis !). Elle place l’histoire au cœur de l’antre Borgia, avec Rodrigo : le futur pape ! Nous on le sait, mais pas eux, et ils se demandent bien comment ils vont y parvenir, vu que ce n’est franchement pas gagné.
Chose étonnante : le roman est écrit à la première personne : Francesca, une jolie nénette libre et indépendante, qui fait ce qu’elle veut quand elle veut (y compris se déguiser en homme sous les yeux réprobateurs des curés du coin qui ont brûlé Jeanne d’Arc pour moins que ça). L’histoire commence avec elle, qui avoue franchement avoir empoisonné l’empoisonneur remplaçant de son père décédé (empoisonneur de son vivant). Borgia l’embauche donc fissa pour assurer sa protection personnelle, et asservir ses desseins. La consigne est simple : tuer le pape en faction pour le remplacer.
La suite oscille entre le nunuche et le gravissime. Parce que la fille qui fantasme sur tous les types qui passent (qui sont tous beaux comme des anges, comme des sculptures, comme des icônes… au choix), qui prend douze bains par jour et qui n’a même pas mal malgré ses côtes cassées… Je trouve ça un peu léger. Mais à côté, être empoisonneuse professionnelle n’est pas l’apanage des bonnes sœurs. Malgré quelques questions existentielles (pas facile tous les jours d’avoir des morts sur la conscience), Francesca a toujours ce qu’elle veut, quand elle le veut.
C’est là que la magie de Sara Poole opère : elle réussit à alléger la lourdeur d’une histoire un peu glauque, avec une héroïne qui frise la superficialité et un sujet en béton. Au fil de l’histoire, ce qui semble être une lubie de Rodrigo Borgia, lui faire prendre la tête du royaume papal devient une nécessité pour le peuple Juif. Oui, les Juifs, encore eux, non, je n’ai pas fait un autre saut dans le temps, oui ils n’ont jamais cessé d’être accusé de tous les maux doublés de boucs émissaires des chefs. Parce qu’Innocent (qui est la marionnette d’un autre prétendant au trône, soit dit en passant !), veut simplement expulser les Juifs de son pays (ils avaient auparavant été expulsés d’Espagne), loi que Borgia n’approuvera pas s’il est élu. La suite devient une course contre le tic-tac de l’expulsion : changer de pape avant la signature.
Sara Poole signe ici une sorte de nouvelle génération de roman historique : une intrigue politique menée par une jeune tête brûlée au temps de la renaissance Italienne. |