Comédie dramatique de Jalie Barcilon, mise en scène de Hala Ghosn, avec Hélène Lina Bosch, Jérémy Colas, Céline Garnavault, Darko Japelj et Jean-François Sirerol.
Sous l'impulsion de la jeune comédienne et metteur en scène Hala Ghosn et l'encadrement de Julie Barcilon pour le texte, de la réflexion et de l'écriture collectives de la Compagnie La Poursuite et de la Compagnie Mazikart sur le thème de l'identité est né un spectacle résolument contemporain, totalement accompli et idéalement roboratif.
Librement inspiré de l'essai de l'écrivain Amin Maalouf paru en 1998 intitulé "Les identités meurtrières", "Apprivoiser la panthère", la panthère symbolisant l'identité, cette nébuleuse au coeur d'amadou qui s'enflamme à la moindre étincelle pour finir en explosion d'intolérance et de violence, résout par ailleurs de manière aussi alchimique qu'intelligemment pensée la quadrature du cercle.
En effet, Hala Ghosn réussit l'articulation d'une thématique socio-politique non seulement d'actualité mais ultra-sensible, qui, sans manichéisme ni discours moralisateur, n'est abordée ni par la voie du didactisme pédant ni de l'engagement militant ou de la démonstration démagogique, du registre de l'humour et de l'absurde qui pousse les incohérences, les contradictions et les revendications nationalistes dans leur dernier retranchement, celui de la bêtise et de la stupidité dangereuses, et ce aux confins du tragique, et d'une forme une forme résolument contemporaine qui ne sombre pas dans la resucée du théâtre d'avant-garde des années 70 ou de la (im)posture du théâtre multimedia.
Et, cerise sur le gâteau, cela reste une représentation théâtrale avec une forte composante ludique due notamment à la mise en abîme qui induit une habile imbrication habile du réel et du fictionnel.
Par le procédé de la métaphore de la zizanie explosive qu'elle sème au sein d'une petite troupe de comédiens, le spectacle, composé de micro-scènes inspirées de faits presque anodins du quotidien et de petites histoires ordinaires, tels le joker du passeport allemand, la distribution de jus d'orange Jafaden sur une compagnie aérienne arabe ou la chanson gagnante du Concours de l'Eurovision, qui transposée dans le cadre d'une nation peut conduire à la guerre civile, le spectacle scrute et décrypte toutes les déclinaisons de la quête identitaire et de ses dérives.
Dans une scénographie, son et vidéo inclus, signée Jérôme Faure et Frédéric Picart dont chaque élément est signifiant et non illustratif, et la mise en scène tonique de Hala Ghosn, qui use de la douche écossaise, de l'interactivité et du kaléidoscope stylistique, du quizz musical au drame, les comédiens sont au taquet.
Céline Garnavault (la dramaturge sarthoise), Jérémy Colas (le clown sans frontières breton), Jean-François Siderol (le grand reporter français converti à l'Islam), Darko Japelj (le comédien gay et croate), Hélène Lina Bosch, l'animatrice qui se veut citoyenne du monde et Rida Solé (la comédienne libanaise exilée et déclarée ennemi public pour ne pas avoir soutenu la guerre) sont les pétulants et inspirés interprètes inspirés de ce spectacle profond à la gravité espiègle et lucide. |