Comédie dramatique écrite et mise en scène par Nathalie Fillion, avec Olivier Cruveiller, Jean-Claude Durand, Laurence Février, Manon Kneusé, Hubert Lemire, Carole Malinaud, Estelle Meyer et Ismaël Tifouche Nieto.
Les affres des pauvres enfants de bourgeois sont-elles susceptibles d'intéresser Margot et de soutenir une intrigue théâtrale ? Rien n'est moins sûr.
Surtout quand, comme en l'espèce avec "A l'Ouest", la partition de Nathalie Fillion, il ne s'agit même pas d'angoisse métaphysique mais de vide existentiel et que la seule inquiétude de ses adulescents bourgeois, manifestant peu d'appétence quant à l'entrée dans la vie active et même dans la vie tout court, consiste en la qualité des prestations de l'hôtel 5 étoiles que constituent l'appartement paternel et la maison de vacances à La Baule.
Avec ce titre, grande est la tentation d'entonner qu'à l'Ouest rien de nouveau. Et hélas, pire, à l'issue d'une pièce fleuve de deux heures qui plonge le spectateur, plus souvent qu'à son goût, sinon dans la solitude au fond des bois du moins dans l'ennui face à la vacuité, non seulement rien de neuf mais que du vieux.
A l'ennui s'ajoute la déception car ce dernier est loin de retrouver sur scène les ambitieux développements analytiques de la note d'intention de l'auteure-metteuse en scène entre autres quant au théâtre-machine, à la "mini épopée, sans dieu, ni tragédie, une pièce miroir qui analyse les confusions et incertitudes communes dues aux temps de crises plurielles", la dualité crise familiale-épopée sociale.
Et pourtant, ce qui est dommage, la qualité de plume se manifeste parfois ainsi que, souvent, une "petite musique" mais le coeur de cible fait défaut sous l'avalanche de clichés à laquelle succombe une famille recomposée en voie de décomposition.
Tous, sauf le grand-père alzheimérisé, s'ils pensent ce n'est qu'à l'argent. Mais chut, rappelle la doyenne : chez nous, l'argent est un sujet tabou et, s'il faut absolument évoquer notre situation, on ne dit pas qu'on est riche mais qu'on a du bien. Ce qui situe déjà bien le milieu.
Face à un père quadra doublement divorcé qui s'est entiché d'une jeune étudiante, continue d'entretenir ses ex-épouses parties aux antipodes faire du caritatif ou du développement personnel et des squatters-pique assiette, et de surcroît maniaco-dépressif en phase de dilapidation de ses deniers, ses deux enfants, un couple frère-soeur vaguement incestueux s'inquiètent et appellent la grand-mère à la rescousse. Le confortable appartement et la villégiature de la côte atlantique seront-ils sauvés ?
Voilà pour l'insoutenable suspense qui s'achèvera par un happy end dans lequel le trio de comédiens aguerris que forment Laurence Février, Jean-Claude Durand et Olivier Cruveiller tire relativement bien son épingle du jeu en parvenant à donner une corporéité à leur personnage.
Dans le rôle du fils dépressif, Olivier Cruveiller est bien "à l'Ouest" mais pas tant que son père incarné par Jean-Claude Durand qui compose une partition exceptionnelle. Quant à Laurence Février, elle campe une mamie flingueuse qui n'aime pas qu'on touche au grisbi, fut-ce le fruit de ses entrailles qui rappelle la tatie Léontine interprétée par Françoise Rosay dans le film "Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages" de Michel Audiard.
Quant aux jeunes comédiens, telle la jeune génération épinglée par Nathalie Fillion, qu'il s'agisse des aînés, Hubert Lemire et Carole Malinaud, ou des frais promus (Manon Kneusé et Estelle Meyer du CNSAD et Ismaël Tifouche Nieto de l'ENSATT, ils restent face à l'indigence psychologique cosmique de leur personnage. |