D'un conte philosophique installé au Paradis et faisant de Dieu un protagoniste (presque) comme les autres, on aurait tendance à supposer qu'il militera pour l'athéisme. C'est la grande finesse de ce Pangée que de savoir rester nuancé, et de prendre à contre-pied le refus autant que le don de la foi, l'agnosticisme autant que l'espérance – et de dessiner de nos attitudes religieuses / métaphysiques / existentielles une carte détaillée et subtile.
Mais là où Werber entendait, en sous-texte de ses sortes de polars cosmogoniques, délivrer un message sur le sens même de l'existence (qui était finalement directement inspiré des paroles de sagesse de toutes les traditions religieuses), Grondeau se contente d'un roman léger, métaphysico-existentialiste sans prétention, qui vaut plus par les questions qu'il soulève que par les réponses qu'il ne donne pas (sur le bonheur, la responsabilité, la liberté, la solidarité – et leurs inverses). Un roman pertinent autant qu'impertinent, donc.
Car la véritable préoccupation de ce Pangée, premier roman de l'universitaire et DJ (?) Alexandre Grondeau, est bien celle-là : interroger la façon dont l'homme se tient face à ce monde qu'il habite, la création divine supposée.
On suit donc le séjour, étonné et poliment insoumis, d'un simple humain au Paradis, les fils légers d'une intrigue relâchée, mue perpétuellement par l'indécision. Et si le héros se prénomme Pangée ("toute la Terre") et se nomme Dolbach (du nom du Baron d'Holbach, père du matérialisme athée, c'est-à-dire d'une science sans Dieu), c'est que le roman regarde du côté de la fable plus encore que de celui d'une littérature prétentieuse s'imaginant pouvoir apporter sur la question de Dieu un éclairage inédit. Alexandre Grondeau se contente de rappeler des évidences qui vont sans dire – mais peut-être cela ira-t-il mieux encore en les disant... |