A l'occasion de la sortie
de leur deuxième album et à la veille de leur Black
Session à la Boule Noire, Carlos
du groupe en pleine essor Interpol a bien
voulu nous accorder une interview
Il s’est passé 3 ans depuis la sortie
de « Turn On The Bright Lights ». Qu’avez-vous
donc fait pendant ce temps ?
Carlos : Nous avons principalement tourné,
tourné, tourné et encore tourné. Ensuite nous
avons pris quatre mois pour répéter et écrire.
Puis trois mois pour enregistrer.
Vous avez enregistré où ?
Carlos : Dans un studio du Connecticut, avec Peter
Kedis, qui avait déjà travaillé avec nous sur
l’album précédent.
Vous avez donné votre premier concert lors
de la route du rock en 2001. Vous étiez totalement inconnus
et au bout du compte vous étiez la révélation
du festival. Vous semblez avoir un rapport privilégié
avec la France.
Carlos : Oui, c’est vrai que nous sommes
flattés et contents de l’accueil que nous a réservé
le public français. Je pense que notre style musical avait
de quoi intéresser les gens ici en France. Mais bon une fois
que nous avons "explosé" les choses se sont stabilisées.
Le succès était le même dans beaucoup de pays.
Mais ce que nous aimons avec le public français, c’est
qu’il se fait son opinion par lui-même, il écoute
la musique et apprécie. Si tu prends l’Angleterre,
c’est différent : les gens se fient au NME, à
Q . Ils se forgent leurs goûts uniquement à la lecture
de ces publications et font principalement confiance aux journalistes.
Votre nouvel album sonne plus abouti, plus immédiat.
Es tu d’accord avec cela ?
Carlos : Oui et non. Certaines personnes me disent
qu’ils ont du mal à rentrer dans ce nouvel album. Il
faut du temps pour s’approprier certains morceaux, accéder
à leur sens réel. En ce qui concerne le côté
immédiat, je suis d’accord : sur deux ou trois morceaux
(ndlr : dont l’impeccable Evil) nous nous rapprochons du format
pop. Ces morceaux sont de bons singles potentiels. Nous essayons
de faire des chansons qui durent environ trois minutes, donc au
bout du compte on se rapproche tout le temps du format pop. Maintenant
il ne s’agit pas de quelque chose de conscient, du moins nous
évitons de faire les choses de manière trop consciente.
Il y une volonté de faire les choses de manière concise,
même si il y a un morceau un peu moins pop : "Not Even
in jail". Il s’agit d’un bon contrepoint dans l’album.
Dans quel état d’esprit êtes-vous
entrés en studio ? Vos compositions sont toujours un peu
teintées de mélancolies. Est-ce conscient ?
Carlos : En fait je pense que notre musique est très cinématographique.
Notre approchons nos morceaux comme si nous écrivions une
bande originale. Les BO sont souvent mélancoliques, donc
par la force des choses notre musique l’est. En ce qui me
concerne, j’aimerais beaucoup composer une bande originale,
c’est une de mes ambitions, un de mes projets.
On te l’ a proposé ?
Carlos : Non pas vraiment, mais quand je regarde
un film, je suis vraiment attaché à la bande originale,
à la mise en son des images. Je suis très fan d’
Angelo Badalamenti. Mais je pense que le groupe devrait se lancer
dans la composition d’une B.O. Cela serait bien de partir
de quelque chose d’imposé et de composer à partir
d’images, un peu comme Air sur Virgin Suicides. C’est
une grosse influence. Je parlais de Badalamenti et de son travail
sur Twin Peaks avec David Lynch, mais il y a aussi la musique de
ce groupe progressif allemand Popol Vuh qui a travaillé sur
les films de Werner Herzog. Bref, c’est un univers à
explorer.
On a beaucoup parlé des influences de Joy
Division ou encore des Smiths à votre sujet. N’est-ce
pas difficile de se libérer du carcan des influences et de
s’imposer comme un groupe à part entière ?
Carlos : Associer un groupe à tel ou tel
autre est normal voire utile pour les gens. Tu conseilleras plus
facilement Interpol à un fan de Joy Division qu’à
un fan de Motley Crue… Mais bon il arrive un moment ou ces
références constantes nous ennuient. Le problème
est que certaines personnes ne vont pas chercher plus loin et ils
ne comprennent pas ce que le groupe veut réellement faire
passer. Ils restent à la surface. Le deuxième album
va nous permettre de lever le poids de ces influences. Notre musique
est plus profonde, elle est composée de couches diverses
et complexes…
Suite au succès rapide qui a suivi la sortie
de "Turn on the bright lights" ,ne sentez vous pas une
certaine pression ?
Carlos : Je ne pense pas que notre succès
ait été si rapide que cela. Les choses ont mis du
temps à se mettre en place. Notre première tournée
américaine, nous l’avons faite en van, ensuite nous
sommes passés au stade supérieur, et nous avions un
tour bus. Quand les gens ont commencé à s’intéresser
à nous cela faisait un an que nous tournions sans relâche.
Au Etats-Unis, nos ventes étaient constantes, il n’y
a pas eu de "razzia" sur les disques d’Interpol
à un moment donné. Là nous sommes confiants,
on ne se met pas de pression particulière.
Comment vous sentez-vous dans la scène
new yorkaise ? Avez-vous des affinités avec des groupes ?
Avec la scène des Liars, TV On The Radio, Yeah Yeah Yeahs
?
Carlos : Nous sommes de Manhattan. Tv On The Radio
et les Liars viennent de Brooklyn. Je crois que les gens essaient
de créer des connections entre tous les groupes de New York.
Mais il n’y en a pas forcément.
Quel est le programme pour les prochains mois
?
Carlos : Là nous sommes en promo à
Paris. Ensuite Amsterdam. Nous revenons en France en Novembre avec
Bloc Party.
Pouvez revenir sur le titre "Antics".
Carlos : En fait les français pensent que
antics veut dire "antiquités" mais ce n’est
pas la traduction d’Antics. En anglais, il s’agit de
facéties, de faire des blagues ou de faire le guignol. C’est
un beau contre-pied. C’est un titre humble qui ne se prend
pas au sérieux…
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