Spectacle musical conçu et interprété par Catherine Delourtet et Jean-Paul Delvor.
Le vieux vocable "fantaisiste" exhumé de la malle d'osier du grenier... En avant pour "Folles Noces" au Théâtre 14, où l'on n'a pas froid aux yeux.
Tout commence très mal. Un mariage de province, une mariée dans une robe affreuse (genre meringue fendillée, ramassée par la boulangère), un cousin en habit (mais avec des chaussures à lacets), un marié pur polyester, à chemise de couleur et cravate coloris vinasse : ils sont vulgaires, ils chantent faux, ils racontent n'importe quoi.
Et ils nous rappellent furieusement les cousins de Charente Maritime qui ont joué de l'avertisseur dans les rues, ri pendant la messe et passé des diapositives d'eux bébés au dessert.
Mais attention ! Comme certains entrent dans la cinquième dimension, vous abordez, avec ces deux comédiens chanteurs délirants, le cinquième degré, celui de la Folie douce, des Branquignols ou d'Helzapoppin.
Une fois avoir bien désespéré, par la représentation de l'union d'un cadre bancaire avec une vieille fille revêche et de leurs amours niaises et exhibitionnistes, les deux compères, tout à coup, passent à la vitesse spatiale et nous voici dans un bastringue de banlieue, avec deux zigomars déchaînés, qui transpirent de talent, de comédie, de drôlerie.
C'est tout le Music-hall français et mon-dial, Brodway-La Garenne et le Faubourg-Saint-Denis qui y passe. L'excellent pianiste-guitariste Thomas Ribes joue de la vraie musique, pas de la conserve. On savoure.
Jean-Paul Delvor est un chanteur-comédien-travesti-clown-mémorialiste : tête de boy du Casino de Paris, corps élastique, jeu fatal. Il prend tous les accents et toutes les mimiques (Pelvoorde, Damia, Gainsbourg, Azanavour). L'évocation d'Edith Piaf remontant des catacombes est un moment de succulence cynique.
Catherine Delourtet est une dame, pas l'air commode, une vraie comédienne qui chante aussi, avec un tempérament à la Valérie Lemercier et une classe folle. Elle est aussi démente que son acolyte et l'hystérie monte vers la zone rouge, avec des déguisements insensés, une indécente sortie du sujet - ils n'en ont rien à faire, ils sont de carnaval! - et l'on n'ose imaginer le final.
Mais rien ne nous sera épargné ! Grotesque, avec des feuilles de vigne mal-placées, des serpents en plastique, de la musique "subelime" !
Enfin, le rideau tombe, les deux agités doivent rejoindre ou l'asile d'aliénés ou une vie très normale. Ils se sont bien fichus de nous! Et nous, d'eux, donc!
Mais si vous avez une âme d'enfant joueur, vous aurez reconnu deux vrais artistes, dans le don total, dans une tradition de la "fantaisie" à la française, avec un métier confondant.
Bonheur total, décalage et décollage garantis..
Pas étonnant que le public ovationne ce Pas-de-deux bien plus chavirant que le Grand huit américain. |