Vendredi 25 mai
Début du rendez-vous immanquable qu'est devenu Art Rock. Les plus chagrins, dont je fais partie, reprocheront au festival un certain manque de prise de risque sur la grande scène de Poulain Corbion cette année, ainsi que la présence de certains artistes programmés il y a seulement deux ans (Charlie Winston ou encore Thomas Dutronc). Cependant, beaucoup d'artistes programmés au forum de la passerelle, dont les très attendus Thee Oh Sees, devraient satisfaire les festivaliers les plus exigeants.
Mais le plus d'Art Rock est d'offrir plus qu'une programmation musicale : une exposition d'art numérique, des projections de film au petit théatre (un très passionnant documentaire sur le couturier britannique Paul Smith, des rencontres littéraires orientées autour de la musique. Autre concept intéressant, le Rock'N Toques : une série de stands où les chefs de cuisine locaux proposent une délicieuse street food. Une série de mix sont également proposés dans les bars briochins tout au long de la journée. On a ainsi pu apprécier les excellents mix de Lamar Shedd et Julien Tiné qui ont rythmé les apéros des festivaliers et des clients de Chai Pierre ou encore du 1701, deux bars incontournables de la ville. Tous ces éléments contribuent au charme du festival briochin qui transforme le centre de Saint-Brieuc en village du festival.
Ce vendredi a surtout été marqué par la prestation des Américains de Thee Oh Sees. Les San Franciscains ont chauffé le forum à blanc avec leur rock garage tendu noyé sous un déluge de guitares bruitistes à souhait. Dommage que les quasi locaux de Juveniles aient un peu fait retomber l'atmosphère avec leur pop synthétique et un set bien trop court. Malgré un concert honnête, le public, encore sous le choc des assauts soniques de Thee Oh Sees, est rentré timidement dans le concert...
Samedi 26 mai
La grosse claque de ce samedi restera sans conteste la prestation de Rover. Il a beau être 23 heures, Thomas Dutronc a beau faire le playboy sur la scène de Poulain Corbion, le public est nombreux pour écouter le rock flamboyant de Thimothée Regnier. Oscillant entre ballades sublimes et montées épiques. La maîtrise est totale et le public briochin conquis. Les rangs sont épars au début du set de Ghostpoet, projet d'Obaro Ejimiwe, un Londonien nominé au Mercury Prize pour son excellent premier album. Petite déception ce soir. Le Britannique peine à faire décoller son concert et les rangs se vident rapidement... Il faudra attendre l'excellent "Cash And Carry Me Home", malheureusement son dernier morceau, pour se rendre compte de l'efficacité de son mélange d'électro et de dubstep.
Ces derniers temps, on a beaucoup entendu parlé du collectif Breton, mené par le charismatique Roman Rappak. Signés sur le très pointu label Fat Cat, le groupe brouille habillement les frontières entre musique expérimentale et arts visuels. Rappak se met d'emblée le public dans sa poche en lançant : "vu notre nom, inutile qu'on se sent un peu chez nous ici" dans un français impeccable. On a pris les paris pour qu'il nous refasse la même à la Route du Rock cet été. Coupe à la mode (la petite mèche comme il faut), ils débarquent cachés sous la capuche de leur sweat shirt. Leur art rock à la confluence du rock de l'éléctro et du post-rock est porté par les vidéos très esthétisantes du groupe qui se filme dans leur loft joliment baptisé BretonLabs. Pendant une coupure de courant d'un quart d'heure, le groupe se lancera dans une trance quasi chamanique en se défoulant à quatre sur la batterie du groupe, avant de terminer un set convaincant, mais sans plus.
Dimanche 27 mai
La journée commence tranquillement au son d'un mix en terrasse, en sirotant un coca (la soirée s'est un peu prolongée samedi soir). Cependant, pas le temps de traîner, direction Poulain Corbion histoire de vérifier ce que le crew 1995 donne sur scène. Lorsque le collectif déboule (littéralement) sur scène, le public composé à 90 % des collégiens et lycéens du coin (dont les miens qui n'ont pas manqué de me faire des "Big Up") se déchaîne. Mais il faut dire que les Mc's du posse parisien savent y faire pour se mettre le public dans la poche. Loin des clichés du rap français débité au kilomètre sur Skyrock, les 1995 posent leur flow sur des instrus inspirées et "old school" à souhait.
Malgré mon allergie au Reggae, je fais un saut au concert de Stephen Marley et me surprend à me faire bercer par les basses charnues si caractéristiques du reggae. Le rejeton de Bob Marley pioche allègrement dans le répertoire de son géniteur, et sa version de "Buffalo Soldier" démontre une fois de plus que le reggae reste une valeur sûre chez le lycéen breton.
C'est avec une certaine impatience que l'on on attend la prestation de Theophilus London. Ce rappeur New Yorkais atypique, dandy stylé, fan des Smiths et de Morrissey (il est l' auteur d'une mixtape intitulée "This Charming Mixtape" et tient un blog intitulé This Charming blog (en référence au titre "This Charming Man" des Mancuniens), intrigue. Ce soir, on assiste simplement AU concert du festival. On regrette qu'il soit programmé si tôt, vu comment son mélange de hip-hop, groove et soul a donné des fourmis dans les jambes des plus réticents spectateurs briochins présents ce soir, place Poulain Corbion. Autant dire que le folk des hippie / hipsteuses (ça doit être le féminin de hipster, non ?) de Brigitte semble bien fade suite au show tellurique de Theophilius. Moulées dans deux robes "boule à facette", le duo entame leur concert par leurs "tubes" "Battez-vous" et "La vengeance D'une Louve". Leur reprise de "Ma Benz" de NTM aura raison de ma patience et m'aura surtout donné envie de ré-écouter la version de Katerine. Et puis derrière il y a Shaka Ponk... Les lycéens y trouveront très certainement leur compte. En ce qui me concerne, non merci.
Direction le forum pour écouter El Hijo De La Cumbia dont le mix électro latino caliente, même si l'on est loin de "Samba De Janeiro", aura raison de ma patience... Direction la Chapelle Lamenais. |