Monologue dramatique de Samuel Beckett dit par Jean Pétrement dans une mise en scène de Jean Jacques Chep.
Après "Proudhon, modèle Courbet", La Compagnie Bacchus propose un très beau travail sur "La dernière bande", monodrame écrit par Samuel Beckett en 1958, à la quasi mi-temps de sa vie, qui livre en version condensée la quintessence de la métaphysique beckettienne à travers les soliloques d’un vieil homme ressassant son passé.
Décor naturaliste, une pièce à vivre, à mourir, pourvue de quelques pauvres meubles vétustes et déglingués d'un autre siècle, où tout va de travers, la table est bancale, l'ampoule électrique grillée, en proie à une inéluctable déliquescence à l'image de celle de son occupant, un vieillard cacochyme qui s’agite et tourne sur lui-même comme une toupie.
Ce maugréant dévoreur énamouré de bananes semble se livrer à un rituel aussi ésotérique que confus en se préparant pour ce qui pourrait être un moment de lecture et s'avère être l'écoute d'enregistrements de propos autoréflexifs qu'il a tenu au long de sa vie comme un journal sonore.
Jean Pétrement donne à ce bonhomme peu ragoûtant au comportement burlesque, à la fois pathétique et répugnant, pitoyable et pourtant si humain, une figure de grotesque qui évoque celle des clowns tragiques de Mattéi Visniec.
Sur une partition pou rmoitié sans paroles, et sous la direction efficace de Jean Jacques Chep, il compose, au terme d’un jeu tragi-comique qui ne cède ni à la trivialité ni au cabotinage, toute la misère et la solitude profonde attachées à la condition humaine, telle que la conçoit Samuel Beckett, qui, du dérisoire à l’absurde, génère un profond désarroi qui empêche non seulement d’agir mais également d’exister.
Le spectacle particulièrement réussi, comme l'étonnante performance de Jean Petrement, constitue une belle entrée en matière avec l’univers becketttien auquel il donne chair. |