Vendredi 14 septembre à Granby. Troisième jour des vitrines de découvertes du festival. C'est l'occasion pour les organisateurs de festivals québécois, français, belges et suisses de trouver de nouvelles têtes à proposer pour leurs prochaines éditions, et de créer un échange entre la belle province et le vieux continent. Ces vitrines se tiennent durant l'après-midi à la United Church au centre de la ville.
La première chanteuse à passer s'appelle Catherine Durand. Ce n'est pas une inconnue pour les professionnels québécois puisque c'est déjà son cinquième album dans une veine variété country folk.
Cette jolie brunette aux yeux clairs et aux bottes de cow girl interprètent des chansons d'amour légères. C'est rafraîchissant, agréable. Elle a une jolie présence et un joli sourire, mais il lui manque quelques failles et aspects saillants pour se démarquer d'autres chanteuses folk FM. Cependant, le côté consensuel qu'elle développe et son accent peu marqué pourraient aussi lui ouvrir les portes des radios françaises.
Vient ensuite Klô Pelgag, gaspésienne finaliste au FICG l'année passée. Son univers tout comme sa personnalité en scène sont largement décalés. Elle est habillés de leggings à motifs géants de "Judith et Holopherne" de Gustav Klimt. Comme chez le peintre, viennois qui habillait ses toiles de feuilles d'or, la musique de la jeune Chloë est très riche, mêlant à sa pop cordes et cascades de voix. Un violon, un alto, un violoncelle, une contrebasse accompagnent la batterie occupée par un batteur affublé d'un casque de hockey et la guitare électrique ou les claviers dont joue Chloë.
Parfois on sent des influences d'Arcade Fire dans cette musique et dans ces textes pourtant complètement personnels. Et même lorsqu'elle joue avec un sabre laser sur scène, la sensibilité de Klô Pelgag n'est en rien émoussé.
Massicotte est un ancien candidat du Festival International de la Chanson de Granby. Son tour de chant commence avec un morceau intitulé "Sur les routes de l'Ontario". Il a un peu le physique de Seth Rogen. Il fait penser à Robert Charlebois, et pas seulement pour la coupe de cheveux. Son folk électrique, son accent fortement marqué sur des chansons d'amour comme "T'as lancé d'la neige sur mon coeur" rappellent les chanteurs québécois qui ont marché en France dans les années 70. "J'ai jamais su danser" ou "Donne-moi donc d'l'argent" ne peuvent cacher leur origine. De la chanson qui a le goût du terroir.
La quatrième chanteuse, Amilye, a sorti son premier album en 2008. En se baladant à Granby, on voit dans la vitrine du disquaire l'affiche de son second album, Le Royaume, paru peu de temps auparavant au Québec et qui fait un carton. C'est de la variété FM qui mélange folk et soul, et saupoudre le tout d'un peu de rap. Amilye a un fort joli minois, joue de la guitare mais doit encore apprendre à bouger sur scène surtout lors des ponts musicaux où elle semble gênée d'être sur le devant de la scène sans intervenir directement dans la chanson. Parfois, des nappes de violon et de violoncelle viennent enrichir les arrangements de cette pop sucrée. Tout cela est carré et professionnel malgré la jeunesse du groupe.
Le soir venu, il y a encore des concerts sur diverses scènes, au coeur de la ville. Le festival de Granby nous offre de superbes concerts mais pas le don d'ubiquité, nous sommes donc obligés de faire un choix dans la riche programmation.
La première salve sera tirée par Mathieu Lippé, gagnant du concours l'année dernière. Son slam s'est enrichi de sonorités world. Ses textes restent orientés grand public, mais ils semblent correspondre à l'attente des spectateurs. Mathieu Lippé fait partie des artistes présents à Granby qui, par les thèmes abordés dans les chansons ou en raison d'un décalage entre l'évolution de l'offre proposée au public des deux côtés de l'Atlantique, peinera à convaincre le public européen, tout comme certains français qui ne perceront pas sur le marché québécois.
On rejoint la grande scène pour apercevoir le concert des rappeurs de Radio Radio. Originaires de Nouvelle-Écosse, leur rap en acadien et en chiac est proprement incompréhensible pour les français, et pour beaucoup de québécois aussi d'ailleurs. Ceci ne les empêche pas de cartonner dans les charts depuis 2008. Leur nouvel album Havre de Grâce vient de sortir chez Bonsound, gros label québécois. C'est autour des chansons de cet album que s'articule l'ensemble du spectacle puisqu'on retrouve les titres "Galope", "Gong Hotel" ou "Yélé Yélé". Mais ce sont bien entendu les titres plus anciens comme "Jacuzzi" et surtout "Guess What ?" qui font le plus bouger le public. Les trois de Radio Radio font le show. Derrière, un batteur qui assure et une trompettiste aux cheveux rouges. Ça claque, ça envoie. Pas besoin de comprendre pour avoir envie de bouger et de faire la fête.
On retrouve ensuite Lisa Portelli sur la scène où Mansfield Tya a joué la veille, le Cent 50. La pop-rock de Lisa Portelli est plus directement accrocheuse que les chansons de Mansfield Tya, l'absence de décor ou de lumières est donc moins dommageable pour elle que pour le duo nantais.
Malheureusement, la pluie a commencé à tomber, et encore une fois les granbyens ne se sont pas déplacés en nombre pour découvrir la jeune française.
Par contre, dans la salle, HK et ses Saltimbanks et les quatre membres de Melissmell, qui tous jouaient un peu auparavant sous le chapiteau, viennent grossir les rangs du public.
Lisa Portelli a balancé un concert alliant puissance et sensibilité. Les chansons vibraient à travers elle. L'intégralité de son album Le régal sera interprété avec brio. Les paroles de Lisa, très personnelles, parfois tendres, parfois crues, prennent toute leur force en live.
Pour certains québécois, Lisa Portelli est la révélation de cette 44ème édition du festival de Granby. Quant au bassiste d'HK, il me dira avoir découvert Lisa Portelli à l'occasion de ce concert et s'être pris une claque. Un beau concert qui donne envie de retourner la voir lors de son passage prochain à la Maroquinerie à Paris. Certainement y chantera-t-elle ses nouvelles "tounes" (en québécois dans le texte) : "En sueur", les deux nouveautés révélés la veille "Manuel" et "Mon enfant" ou encore "L'ange bleu". Le concert de Lisa Portelli au Cent 50 aura été un des sommets de cette édition 2012 du Festival International de la Chanson de Granby.
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