L’écho répété des vagues ; c’est sous ce joli et poétique titre que Domitille Marbeau Funck-Brentano présente son premier livre. Elle y relate surtout son enfance noyée entre des deuils familiaux, les recherches de preuves d’amour et le côtoiement d’artistes de renom et de politiciens du MRP (dont sa mère était une fervente partisane).
Ce n’est pas un roman, contrairement à ce que promet la couverture. C’est une véritable autobiographie. L’auteur étire, à travers 150 pages, les souvenirs de sa petite enfance jusqu’à son adolescence ; de sa "rencontre" avec sa mère jusqu’à son décès.
Cette femme est omniprésente dans ce roman ; Domitille la cherche à chaque événement de sa vie, qu’il soit anodin ou crucial. Elle tente de la déchiffrer, de percer son caractère à jour, de trouver des réponses qu’elle n’a jamais réussi à saisir. Beaucoup trop de contradictions dans ses attitudes : femme engagée, libérée, elle semble pourtant prisonnière de ses principes et de sa rigidité intellectuelle. Figure maternelle aimant ses deux premières filles mais dévastée par la mort de son aînée, elle confie sa petite-dernière, Domitille, à sa grand-mère et ne la reçoit dans l’appartement familial que lors des week-ends et des vacances… Difficile de s’épanouir face à cette figure maternelle, d’aimer, de s’aimer, de se faire confiance, d’oser s’exprimer…
Heureusement, l’écrivain évoque aussi son père et sa sœur ; deux personnes plus ancrées dans l’émotion, qui équilibrent ce jeu de cache-cache affectif en l’initiant, au fil des années, aux arts pratiqués à l’Opéra. Enfin, en périphérie de ces épais brouillards familiaux, le lecteur aperçoit ce qu’ont pu être ces années 1950-1965 tant au niveau politique que mondain - dans un certain milieu de la bourgeoisie française, bien entendu. Là encore, les paradoxes ne sont pas niés : au milieu de tout ce "beau monde" talentueux et riche, la petite Domitille ressent pourtant souvent une grande solitude et un immense vide. Les réponses de ces adultes ne la satisfont pas toujours pleinement et des doutes s’insinuent, malgré l’envie de ressembler à sa génitrice et donc d’épouser ses convictions.
Dans un premier livre, l’auteur parle toujours de sa mère, paraît-il, d’une manière ou d’une autre. L’écho répété des vagues ne fait pas exception à la règle. C’est très bien écrit, dans un style soutenu où s’entremêlent de jolis mots désuets et des phrases appliquées. Rien ne dépasse, rien ne s’improvise. Tout est dompté. Et, à moins de bien connaître Domitille Marbeau Funck-Brentano, on se lasse assez vite de ces pages. Une autobiographie peut s’avérer intéressante si son auteur raconte une existence où le lecteur peut imaginer se retrouver, s’identifier, ne serait-ce qu’à travers un trait de caractère ou lors d’une expérience exceptionnelle. Or, dans ce livre, peu de chances de parvenir à cet échange. Il s’agit d’une enfance très particulière, entre deuils familiaux et proches atypiques de part leurs fonctions ou de leurs comportements. On reste donc à l’écart, on remarque évidemment les flots de ces mots, mais on n’y lit rien d’assez envoûtant ou de séduisant pour se jeter dans les vagues à l’âme de l’écrivain. L’écume de ses souvenirs s’échoue ainsi plutôt vainement et le lecteur poursuit sa promenade sableuse sans jamais avoir été éclaboussé. |