Spectacle conçu d'après le recueil éponyme de Thomas Bernhard, mise en scène de Olivier Martinaud, avec Claude Aufaure et Olivier Martinaud.
En France, l’œuvre théâtrale de Thomas Bernhard est bien connue, a fait l’objet de spectacles mémorables et a donné aux meilleurs acteurs matière à se surpasser dans des rôles forts, des rôles toujours parmi les plus marquants de leurs carrières.
Avec "Mes prix littéraires", Claude Aufaure s’attaque à l’œuvre littéraire du dramaturge autrichien et le fait en adaptant un texte apparemment mineur dans lequel l’Autrichien atrabilaire décrit comment il a vécu sa gloire littér
Même héros de la fête, même mis en avant, il ne pouvait que s’interroger sur la médiocrité abyssale des milieux intellectuels surtout quand ils n’ont pas honte de faire cause commune avec les autorités culturelles dans des rituels grotesques d’auto-célébration.
Sur un tapis bleu qui pourrait être celui où un gymnaste va exécuter son exercice, s’il n’y avait dans un coin un pot de chrysanthèmes blancs pour en souligner l’étrangeté dérisoire, Claude Aufaure et Olivier Martinaud se succèdent pour interpréter Thomas Bernhard racontant comment se sont déroulées trois remises de prix.
Si Claude Aufaure est un Thomas Bernhard dans la maturité, qui puise et s’épuise à retrouver le souvenir lointain d’un moment désagréable où tout n’était qu’une question d’apparence et de bonne taille de costume à porter et à supporter, Olivier Martinaud est un jeune Thomas Bernhard fougueux, vivant au présent les désagréments de la condition d’écrivain, et pas encore capable de s’en amuser et de s’en détacher en grinçant des dents.
Dans leurs interprétations dépouillées de tout artifice, les deux acteurs font entendre magnifiquement le poids des mots de Thomas Bernhard, leur causticité, la manière unique qu’il avait de peindre le monde. On rie souvent et l’on est toujours pris dans le tourbillon d’une pensée qui ne s’accordait aucun repos pour disséquer tout ce qui l’entourait, tout ce qui avait le malheur de ne pas être la hauteur d’un monde idéal où la bêtise et l’intérêt seraient exclus.
Le travail de Claude Aufaure permettra de réévaluer un texte paru tardivement et qui est à ranger parmi les grandes œuvres autobiographiques de Thomas Bernhard. On pourra seulement lui reprocher de n’avoir exploité que trois textes sur la dizaine contenue dans "Mes prix littéraires". On en aurait voulu plus pour prolonger ce moment formidable en compagnie d’un écrivain majeur. |