Comédie de Régis De Martrin Donos et Muriel Brot, mise en scène de Régis De Martrin Donos, avec Jean-Baptiste Marcenac et Quentin Moriot.
Conçu par Régis De Martrin Donos (aidé de Muriel Brot), ce spectacle offre la confrontation du grand philosophe, traversant les âges, avec un petit khâgneux, très contemporain, qui lui donne la réplique.
L’encyclopédiste de cet âge dit des "Lumières", que la Terreur éteindra de son souffle fétide, contempteur des intolérances, de l’étroitesse d’esprit des cagots, grand romancier, peut-être d’abord, et manipulateur d’idées est magistralement campé par Jean-Baptiste Marcenac qui a l’aisance, l’allure, le détachement et l’esprit d’un homme de bien du dix-huitième siècle, la diction parfaite d’un comédien bien formé, la présence d’un acteur habité à chaque instant par son rôle.
Face à lui, Quentin Moriot, garçon du début du vingt-et-unième siècle, soumis à la technique, perdu dans un métier de hasard (il est éclairagiste, face au Diderot des Lumières, la lumineuse trouvaille !), il est parfait de naturel, dompteur de sa violence, pénétré de sa supériorité, harcelé par ses doutes, terriblement actuel dans sa solitude et son néant.
Ces deux remarquables comédiens sauvent pleinement cette entreprise quelque peu cahotique, passionnante par fulgurances, s’éteignant parfois, qui frôle souvent l’exercice de style un peu plat et professoral, notamment dans un anticléricalisme d’un autre âge, mais se redresse, quand on s’y attend le moins, portée par ces deux hommes intelligemment distribués, servie par la scénographie de Gérard Espinosa et inspirée par le génie intact de cet immense auteur français.
Un bon moment de révision, un exposé réussi, du théâtre ? Peut-être, avec la prolifération de ces sujets historiques, jugera-t-on, plus tard, l’offre actuelle des scènes (surtout petites) comme une frilosité inquiète devant les grands sujets et les mises en danger et le refuge dans le commentaire et l’appel à la réminiscence.
Mais ce "Diderot bagarre" est de bonne facture et ses comédiens, excellents. |