Jean d’Aillon était économiste, avec un doctorat et un poste dans l’administration des finances au sein de la cour européenne. Et puis j’imagine qu’une douce nuit d’insomnie à voir les chiffres se brouiller devant ses yeux, il décide de tout arrêter. Ou bien il finit enfin par mettre ce foutu point final à son premier manuscrit et le succès l’amène sur la voix de l’écriture. Là où nous le retrouvons aujourd’hui avec les aventures d’Olivier Hauteville, brillant enquêteur au temps des guerres de religion, ci-joint Dans les griffes de la Ligue.
Je n’avais jamais lu cet auteur, je connaissais mal l’épisode de la mort d’Henri III, j’étais gravement atteinte de flémingite aigue pendant les cours d’Henri IV. J’avais donc hâte de combler cette lacune autrement qu’en consultant des manuels quelque peu rébarbatifs. J’ai accueilli ce magnifique ouvrage de 3 kilos et 500 pages avec la fièvre qui me prend avant un voyage dans le temps. Je m’attendais à sillonner le Paris de 1589, à suivre Olivier Hauteville, à me tordre les mains de douleur à rire, à me passionner quoi…
Je m’étais trompée. Jean d’Aillon se rapproche plus de l’éminent professeur d’histoire Max Gallo que du maître du voyage dans le temps Christian Jacq. Pour commencer, une tonne de personnages, trop pour la simple mortelle que je suis. A lire le livre entre deux pauses et sans calepin. Personnages pour la plupart réels, donc patents. Mais j’ai vachement eu l’impression d’arriver en retard à la réunion et que le sujet avait déjà été annoncé et que j’avais raté la présentation des intervenants, qui n’ont pas eu l’obligeance de mettre un petit papier avec leur nom et leur fonction devant leur pupitre.
Donc pas évident de suivre le fil de l’histoire sans prendre de notes, sans référencer les personnages, leur "clan", leur catégorie "gentil" - "méchant"… J’ai fait un petit effort, j’ai cerné l’histoire, passionnante, mais je garde un goût d’inachevé, un peu comme quand tu fais des grilles de Sudoku en regardant Les Experts, il arrive un moment où tu ne sais plus d’où sort ce grand type, ni ce qu’il peut bien fabriquer ici.
Tout commence le 1er août 1589, quand Henri III est poignardé par le moine Jacques Clément. Ce dernier appartient à une organisation (secrète évidemment, composée uniquement de riches au pouvoir avec des noms d’archanges sous des capuches masquantes et des rituels chelous) nommée "La ligue". Une jeune bourgeoise qui passait par là remarque que le Clément tué après le meurtre n’est pas le Clément qu’elle a vu la veille. Mince ! Si un faux Clément a usurpé le vrai Clément, ça veut dire que La Ligue va utiliser le vrai Clément en le faisant croire ressuscité, ce qui renforcera son pouvoir. Et sa crédibilité. Mauvais pour Henri IV. Surtout qu’il était allié à la Ligue. Un complot dans le complot. Voire pire.
Jean d’Aillon est tellement passionné d’histoire qu’il a voulu partager ce mystère avec des lecteurs. Il m’a oublié dans la liste. Les lecteurs du dimanche. Ceux qui n’ont pas de doctorat en Histoire des Henri. A mon avis, il a fait tellement de recherches, réuni tellement de documentations enrichissantes qu’il a voulu nous en faire profiter. En oubliant complètement de romancer son histoire. En faisant apparaître Olivier Hauteville sur quelques scènes. Un peu à la manière d’un docu Arte. Quelques reconstitutions au milieu du documentaire. Intéressant mais pas divertissant quand la force d’un roman historique est de divertir en apprenant, j’ai ici eu l’impression d’être une truite au milieu des baleines… Trop petite. |