Il existe des plombiers qui installent des cuvettes et les artistes qui s’occupent de les transformer en œuvre d’art. D’un côté Mario et Fontaine de Duchamp. De l’autre la musique Yiddish et Noise In Sepher d’Anakronic Electro Orkestra.
Le Sepher est un texte majeur de la kabbale qui est elle-même une interprétation juive ésotérique et symbolique de la Bible. Le titre de l’album est donc une chronique et une définition à lui tout seul qui voudrait dire : "j’ai passé le balai dans les grimoires du répertoire Ashkénaze, voilà ce que ça donne".
Ils sont cinq et toulousains, ont cartonné avec Speak with ghost (j’ai passé le balai dans le tango) il y a deux ans et reviennent avec ce nouvel album.
Et ça donne une pléthore de samples mêlés à un mixage de basses électroniques saupoudrées de ce son particulier qui fait vibrer le diaphragme. Un peu comme une brioche aux pralines. La musique Yiddish, ce sont les pralines concassées (à mettre dans la brioche à la deuxième levée… mais si, vous savez !), et les génies de la formation Anakronic Electro Orkestra seraient la pâte. Au final, vous avez une belle brioche dorée, striée de rose et d’amandes, au goût unique et incomparable de madeleine de Proust pour des générations. Pour les intimes : drum and bass.
Pour le reste, pas facile de mettre des mots sur ce qu’ils font. C’est à la fois risqué et terriblement ingénieux, c’est juste placé entre préhistoire et voitures volantes, avec accordéon et électronique, clarinette et dub, c’est la rappeuse Taron Benson et David Krakauer le chanteur klezmer (musique mélange de slave tsigane du XVème siècle) sur le même album. C’est n’importe quoi ? C’est dangereux ? C’est pas bankable ?
Ils ont parié, misé, essayé et je ne sais quoi encore, je ne doute pas qu’ils se soient bien marrés à produire cette astéroïde intergalactique, parce qu’il se dégage une envie de danse, de torsion, de courses, de virevoltages, des petits pas aux entrechats des pas chassés par les sissonnes endiablés (gaffe à la table basse quand même), aux vertiges et aux frénésies des pieds fous… Ça emporte, transporte, et développe une maxi hyperbole de l’envie de danser sous la pluie et dans la neige (ou le sable, le salon, partout et nulle part).
Une musique ciselée frôlant la perfection, pétrie d’imaginaire et de folie, au-delà des limites que l’on prenait pour acquises, Anakronic Electro Orkestra fait le ménage et le fait bien !
Le pire ? C’est contagieux et comme dirait jolie crevette : "ah ça fait du bien !" |