Narration poétique écrite et mise en scène par Camille Davin, avec Tamara Al Saadi, Romain Blanchard, Flora Detraz et Florian Goetz.
Ophélie est face au vide, au silence envahissant. Son frère Pierre est mort d'une maladie dégénérescente. Ce frère indifférent, au rictus de supériorité s'est dérobé à jamais.
Combler le manque, trouver les traces, se fondre dans l'existence du disparu. Mais que s'est il donc passé? L'univers est comme pulvérisé. Le monde familier est devenu étrange.
Qui est cet individu qui la poursuit: est-il vrai? Pourquoi veut-il l'aimer , quand elle espère encore jusque dans ses rêves la reconnaissance de son frère?
Pierre fascine parce qu'il ne s'est jamais laissé réellement approché, par sa sœur , par ses femmes. Dépossédé de lui-même en quelque sorte, il se coule dans la mort. Quelle agitation autour de lui: ballet des vivants, jeunes ou vieux, ballets des objets. Tout est bon pour le faire durer un peu plus dans les coeurs.
"Ceux qui tombent" est une pièce de Camille Davin sur le deuil et les émotions mélangées qui appartiennent au domaine de l'indicible. Camille Davin crée une mise en scène qui alterne le caché et le découvert comme si un travail était préalable avant que la vérité des objets et des personnages ne se livrent.
Tamara Al Saadi (Ophélie) incarne cette jeune femme paumée avec une grande justesse : fébrile ou flottante avec ce besoin pressant d'exister à travers les mots. Romain Blanchard (le prétendant) apporte le contre point comique absurde. Personnage parfois immatériel qui cherche à posséder Ophélie, qui se dérobe à chaque fois comme Pierre se dérobe à sa propre emprise, sa propre tentative de le définir, de le cerner.
Romain Blanchard est l'homme antidote à l'adulte incertain qu'incarne Florian Goetz (Pierre). Ce dernier suscite comme il convient un mélange de sympathie et d'horreur. Ne va-t-il pas mourir sans avoir su aimer ?
Comme Romain Blanchard et Florian Goetz suggèrent un jeu de miroir, Tamara Al Saadi et Flora Detraz (la maîtresse de Pierre) entrent en résonance. Flora Detraz incarne un type de femmes plus sophistiquée, prise au piège des faux semblants de son amant. Elle répond à Ophélie dans ses parades pour rester debout. Jeux d'équilibre sur le fil de ces corps atteints qui se mettent à danser.
"Ceux qui tombent" se vit comme un chemin poétique qui nous rappelle combien nous sommes désemparés face à la mort: une épreuve partagée par tous qui s'imprime dans nos corps et nos vies... une épreuve dont on se relève. |