La première à entrer sur la scène du Fnac Live 2013 en cette chaude journée de vendredi est Lisa Leblanc. L'acadienne, devenue un véritable phénomène au Nouveau Brunswick et au Québec, a l'habitude des grandes scènes de l'autre côté de l'Atlantique. Alors qui retrouve-t-on dans les premiers rangs, devant la scène ? D'abord nos cousins d'Amérique.
Qu'elle soit au banjo, à la guitare sèche, ou à la guitare électrique, Lisa Leblanc, accompagnée de ses deux musiciens, balance des chansons de son album, sorti en début d'année, et que le public connaît bien. Certes, il y a quelques petits problèmes de son de façade sur le premier titre, "Cerveau ramolli", mais les spectateurs des premiers rangs reprennent "Y Fait Chaud" ou "Chanson d'une Rouspéteuse", et bien entendu "Ma Vie C'est d'la Marde" avec enthousiasme. Pour qui a déjà vu Lisa Leblanc en concert, il n'y a pas de surprise dans ce set mais on ne boude pas son plaisir de la revoir, mais pour ceux qui découvrent, c'est une bonne décharge d'énergie et de bonne humeur pour débuter la soirée.
Arrive ensuite sur le plateau installé devant la Mairie, un groupe brésilien de Buenos Aires, emmené par Mariana Yegros (prononcez "Chegross", déguisés comme des Naïve New Beaters jaune fluo.
Les chansons en Espagnol sont construites autour des percus et de quelques samples. Le musicien qui jouait de l'accordéon sur le premier morceau lâche son piano à bretelles pour saisir une flûte traversière. Et on le voit bondir derrière la chanteuse. On pense à un Smoke City mâtiné de rap, mais l'ensemble à du mal à prendre. L'énergie qui circule dans le groupe ne s'étend pas jusqu'à la barrière qui sépare les musiciens du public, qui d'ailleurs ne répond pas très fort. C'était une musique agréable pour que les spectateurs venus s'asseoir par terre sur l'esplanade de la Mairie de Paris et partager des verres, s'en servent un nouveau et ne prennent pas la peine de se lever.
Mélissa Laveaux arrive devant un public qui commence à se densifier, habillée de noir avec un fichu de couleur sur la tête. La musique de la canadienne est un mélange qui va piocher dans le blues et le folk, qu'elle agrémente d'une touche de reggae et de musique haïtienne. Les premiers rangs répondent aux chansons de la parisienne d'adoption, mais comme pour La Yegros auparavant, le public se révèle difficile à chauffer. A moins qu'il ne soit déjà trop cuit.
Raphael Gualazzi, crooner italien entre Paolo Conte et Sinatra, vient de sortir son troisième album sur le label de jazz Blue Note. Il entre et s'installe au piano, mais est accompagné par trois choristes, une contrebasse, des cuivres et une batterie. Le public peut se régaler de petites chansons à la Michael Bublé, des airs qui entendus pour la première fois semblent pourtant déjà connus. Les choristes ou les trois cuivres se lancent dans de petites chorégraphies. Le crooner pop est généreux, et on peut dire qu'il mouille la chemise. Les applaudissements, même si un peu timides, retentissent jusque dans les derniers rangs. A côté de moi, trois italiennes parlent beaucoup entre elles durant le concert, pour exprimer leur soutien à leur compatriote. Encore un concert sympa en début de soirée pour l'apéritif. On entend d'ailleurs de plus en plus de bouteilles de verre s'entrechoquer.
Keziah Jones arbore en ce chaud soir d'été un simple t-shirt noir, une sobriété qu'on ne connaissait pas au bluesman nigérian. La Place de la Résistance est désormais blindée. Keziah Jones vient pour la première fois tester les nouveaux morceaux de l'album qu'il finalise actuellement en studio en compagnie de Russel Elevado.
Il sourit, se donne, est visiblement content de retrouver la scène. Il offre un énorme concert, technique mais rythmé. Comme d'habitude avec Keziah Jones, le concert tourne trop souvent à l'exhibition technique mais les inconditionnels adorent ça. En fin de concert, il descendra devant la foule pour serrer des mains, se faire prendre en photo avec des fans.
Changement de style avec Breakbot en live qui transforme la place en énorme dancefloor à ciel ouvert.
Le son qui sort des enceintes est puissant, mais musicalement, le DJ d'Ed Banger reprend tous les plans éculés de ruptures de rythmes, douceur de chants d'enfants avant de rebalancer du boum boum.
Pas grand-chose à se mettre sous la dent musicalement, avec un show qui se rapproche de la mauvaise descente à Pataya. Et comme le décor en forme de bouche rouge a dû être piqué à DJ Raymond de Montbéliard qui l'avait bricolé dans son garage, on ne s'éclate pas non plus sur le visuel. Par contre, le public réagit.
Lorsque le chanteur Irfane, à qui on conseillerait d'aller acheter des costards chez Célio tellement sa garde-robe tend à désirer, entonne "Baby I'm Yours", le public devient fou. Mais les videurs du Tropicana Club, du Fuckin' Blue Boy ou du VIP Discotheque n'étaient pas là dans un événement à ciel ouvert. Toutes les bouteilles de verre ramenées pour l'apéro, tombent, roulent, se cassent. C'est le moment où il vaut mieux porter des chaussures fermées plutôt que des tongs.
C'est ensuite Sébastien Devaud, aka Agoria, qui vient balancer à son tour du boom boom estampillé Detroit 1988 / 1989 pour présenter son projet Forms qu'il annonce sans humilité comme un projet complet entre DJ-ing et VJ-ing. Le public est en transe, je m'éloigne de ce qui est devenu un énorme foutoir non-maîtrisé où les clopes allumées sont, par jeu, lancées en l'air.
Le parvis de l'Hôtel de Ville est devenu un immense stage pour yogis shivaïtes qui s'ignorent. Comment apprécier quoi que ce soit alors qu'on marche sur une mer de tessons de bouteilles? Cette soirée se termine non pas sur un souvenir musical, mais sur l'image d'une jeune femme retirant des morceaux de verre de ses pieds avant de rentrer dans le métro, et derrière elle la place de l'Hôtel de Ville de Paris devenue une énorme décharge.
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