"Les textes sont très évocateurs de son récent divorce". Vu comme ça, il n’y a pas 36 solutions, soit l’album est triste et mélancolique et plein de chiantude à mourir ou rempli de haine et de colère. Alela Diane a heureusement une jolie voix tout à fait élégante, un genre de crooner au féminin. About farewell est donc son empreinte d’élégance folk et de l’indulgente nostalgie qu’on emploie pour parler de ses premières amours.
L’écriture de l’album a été une sorte de thérapie sur le chemin de la rémission d’Alela, lui permettant à la fois de tourner la page sur ce morceau de passé et de trouver la force d’avancer. Si je n’avais rien su à propos de son divorce, je n’aurai probablement pas interprété l’album dans ce sens, mais puisque le dossier de presse a choisi cette accroche comme ustensile à sa promotion, je ne vois pas pourquoi chercher plus loin.
J’en serai peut-être arrivée à la même conclusion, tant les cordes de guitares pincées une à une font comme une brume propice aux pensées, tant les mélodies portées par le timbre spécial de la chanteuse évoquent la douceur ouateuse dont les souvenirs sont enveloppés. Dans "timbre spécial", j’entends ce type de voix féminine ni trop haut perchée, ni trop masculine, juste là, comme délicatement posée à la porte des cordes vocales, un peu comme si une grosse bulle restait coincée entre la parole et la voix, fragile et élastique à la fois.
About Farewell est son cinquième album, voilà de quoi dire "cet album est celui de la maturité", en même temps c’est vrai qu’un divorce fait prendre un sacré coup de maturité (pour ne pas dire un coup de vieux), et de sagesse qui transparait dans l’ensemble de ses titres. Bien qu’elle soit jeune, elle deviendrait une sorte de grand-mère feuillage capable de répondre aux doutes des filles les plus naïves comme moi, elle dirait "barre-toi, c’est un con", je la croirais direct, elle dirait "fonce, c’est le bon", je le ferai.
Tout en cordes délicates, pianos discrets et flûtes enchanteresses, Alela Diane met les images sur nos blessures en chantant les siennes, et c’est ce qui la rend attachante. Parce que les expériences qu’elle chante lui donnent une crédibilité certaine. Mais on n’avait pas besoin de ça pour reconnaître le talent où il se trouve, ni pour identifier cette musique du fin fond des Amériques, pas franchement folichonne, mais suffisamment apaisante pour calmer certains doutes sans pousser au suicide.
Les trois S sont de mise pour cet album : Simple, Sobre et Sage. So quiet… |