My Jacket is Yours : une urgence à la Shannon Wright.
Vendredi 27 septembre, Albi. De notre correspondant dans le Tarn, TheFlegmatic.
J'entre au Jour de Fête d'un pas pressé - je suis en retard - et me prends le vide en plein visage. Fabrice, le patron, me fait des grands gestes derrière le comptoir. Où sont-ils tous ? Pas là. Nous sommes à peine une poignée pour le concert de My Jacket Is Yours. Deux personnes entrent à leur tour. Personne pour tenir la caisse. Un regard de Fabrice et je me colle aux entrées.
Deux claviers sur un stand, deux micros, une Squier branchée sur un Vox, un séquenceur sur un pupitre.
Sur des arpèges tendus, son rond, mat, écorché, Pascale, chanteuse à la crinière poivre et sel, entame un chant en français. Chanter du noise en français me fait peur, je me sens soudain à une corrida. Les regards du public s'affutent, ce sont des picadors, en attente, quelques instants suspendus avant une possible mise à mort, on a la trouille que le concert devienne soudain très long, que le taureau agonise pendant des heures, et nous avec... Et là, miracle : ça passe incroyablement bien. Textes précis et flous à la fois, l'art se construit devant nous, prend forme. Soulagement.
On se fond dans le chant de Pascale et Laure, aux claviers, soutient pile aux bons moments le chant de sa soeur. Il y a du Mansfield Tya dans ce duo,et aussi, très vite, une urgence sourde dans les chansons et c'est Shannon Wright de "With Closed Eyes" qui apparaît. L'écoute de leur démo évoquait aussi Raymonde Howard, ce côté crunchy, chansons punchy parfaitement construites.
Au-delà de la qualité dense des chansons, dont la plupart sont finalement en anglais, ce qui est beau, sur scène, c'est l'humilité qui se dégage de la présence des deux soeurs. Regards complices, sourires sur des passages de jeu fragiles que seuls ces regards trahissent, car nous n'y voyons que du feu. Les chansons cavalent tranquillement, sereinement, avec cette urgence noise au corps. Une tension sous-jacente palpite, à la fois sèche et trempée. Electrelane n'est pas loin, tapie dans les claviers, la guitare intense, sûre, sans être passée en force.
Entre-temps le public a bien quadruplé. On sent à l'attention sur les visages qu'il se trame quelque chose ici. On assiste à une éclosion.
Patiemment, sans artifice, My Jacket Is Yours nous a déjà conquis. Nous sommes en présence, nous, cette poignée, de quelque chose qui désormais nous lie. Et nous en redemandons.
My Jacket Is Yours est de Toulouse et joue depuis 2011. Une démo 4 titres est sortie en mars 2012, un album enregistré cet été est à paraître cet hiver. A suivre, donc.
Envoyé par téléfax depuis Le Tarn. |