DenMother est une artiste de musique électronique à la discographie déjà longue de 4 opus, compilant plus d’une trentaine de titres. Originaire de Toronto en Ontario, elle a lâché la bride à son imagination en 2011 et ne semble pas vouloir ralentir sa course de longue haleine qui a déjà les allures d’un marathon.
Découverte sur des chansons minimalistes hantées qui oscillaient entre la bande originale de films et de jeux vidéo, l’artiste met en place un univers aussi sombre que déroutant sur lesquelles sa voix contenue, presque sans passion, trouve des moyens détournés pour s’exprimer.
Sur le chemin qui est le sien, elle égraine ce qu’elle considère être des "tambours de guerre" et autres "synthés distordus", auxquels on peut ajouter des sonorités exotiques déformées et des lignes de basses franchement malsaines. Le tout, la désignant comme le chaînon manquant entre une Björk dépressive et le duo d’Ether Island en nettement plus prolifique.
Pourtant, c’est du côté de Trent Reznor (période Ghost I, II, III, IV – The Slip) qu’on trouvera une comparaison réellement pertinente pour son dernier projet en date : Moon. Contrairement à son avant dernier EP, sorti en 2012, Insides Out, DenMother s’attèle à une œuvre nettement plus mélodique au sein de laquelle des notes éparses de piano (et autres instruments) viennent se télescoper sur les échos de la voix presque morte de la chanteuse.
"Get It" se déroule comme un long couloir sombre que viennent éclairer par intermittence les vocalismes de la chanteuse. A la manière de beaucoup d’autres (comme le duo d’Opale), c’est d’abord la musicalité de sa voix pensée pour accompagner ses productions qui marque. En effet, la plupart des paroles peinent à être intelligibles tant elles sont déformées et modifiées. Plus grossièrement et avec un effet recherché, elle ne prononce qu’une partie des mots, allant directement à la racine de la musicalité des sons exprimés. Sur des titres comme "It’s You", l’effet est même accentué par une litanie de réverbération qui finit par donner un rendu envoûtant.
Plus mélodique encore, l’introduction de rythmes orientaux transformés pas le prisme tarabiscoté de DenMother, offre à des titres comme "Unsaid" et "It’s Almost The End" la prétention de porter Moon sur l’étroite limite séparant la musique minimaliste de celle atmosphérique. Alors que d’autres comme "Chirping" évoque la rencontre impromptue entre la jungle et l’atmosphère froide et implacable des mécaniques de l’industriel.
L’album est donc un quiproquo sonore judicieusement mené que la chanteuse exploite sans vergogne et qui fait preuve d’une identité forte et cohérente tout au long de ses 17 pistes. Et ce n’est pas pour rien que Moon reste, à ce jour, son travail le plus abouti et la promesse d’une évolution des plus intéressantes.
|