Shining, écrit en 1977, nous raconte l’histoire du petit Danny Torrance, enfant doté d’un pouvoir particulier, qui réussit à survivre à l’emprise maléfique de l’hôtel Overlook au sommet des Rocheuses. Il y perdra son père et son innocence.
Dans Docteur Sleep, on le retrouve aujourd’hui adulte, mal dans sa peau et alcoolique. Vaquant de bar en bar, son autodestruction va le mettre dans des situations qui vont vite devenir insupportables. Impliqué dans une sordide histoire dont les conséquences vont le hanter, il décide alors de prendre sa vie en main. Dan quitte tout pour aller s’installer dans une petite ville du New Hampshire. Il y trouvera amis, soutien chez les AA locaux et un boulot d’aide soignant à l’hospice local. Rapidement, les collègues le surnommeront "Docteur Sleep" car il a un talent particulier pour accompagner les mourants dans leurs derniers instants. C’est grâce au don qui lui permet de voir "l’autre côté" et ses habitants, qu’ils soient bons ou mauvais. Ce don lui permet aussi de communiquer par la pensée avec ceux qui le possèdent.
Alors que tout semble s’apaiser dans sa vie, une jeune fille partageant les mêmes aptitudes et habitant à des centaines de kilomètres va le contacter à sa façon. Elle est en grand danger, traquée par d’étranges tueurs d’enfants dont les procédés rappellent à Danny ses pires cauchemars.
Tout le monde connait Shining. Qu’il s’agisse du roman ou de la mythique adaptation de Stanley Kubrick. Cette ambiance glauque et dérangeante où va éclore la folie meurtrière d’un père alcoolique et névrosé. Et cette scène glaçante du petit Danny faisant du tricycle dans des couloirs peuplés de menaces invisibles. Qui ne s’est jamais demandé ce qu’était devenu ce petit gars ? Et bien Stephen King a décidé de lui dédier ce roman et c’est une réussite.
Docteur Sleep se base sur deux axes principaux :
Tout d’abord, le combat de Dan contre l’alcoolisme. Les passages, remarquables, décrivent cette addiction de façon simple, viscérale et honnête. On en ressort touchés jusqu’à la moelle tant cela sent le vécu. Dan Torrance, reflet fictionnel de l’auteur, va suivre le même parcours. Après avoir touché le fond, il va décider de se battre. Ce livre semble être avant tout le récit plein d’espoir d’une guerre contre l’alcool mais aussi contre les parties les plus sombres du Moi pour aboutir à la résilience. Stephen King a pris de la bouteille (désolé, il fallait que je la fasse…) et de l’étoffe en tant qu’écrivain. Ses personnages en ressortent d’autant plus profonds et humains… et ses démons d’autant plus effrayants.
Car le second axe de ce bouquin est bien une histoire de genre dans toute sa splendeur. Notre conteur "d’histoires qui font peur" est en forme ! L’amateur de King retrouvera les thèmes chers au maître américain de l’horreur : la perte d’êtres chers, les enfants maltraités, les addictions, les petites communautés, l’amitié comme dernier rempart face au Mal. Beaucoup de sujets très sombres parfois abordés avec humour. Ici, les croquemitaines prennent l’apparence de camping caristes vieillissants et bedonnants. King aurait été français qu’il les aurait sûrement affublés de bobs Pastis et fait jouer à la pétanque. On est bien loin des créatures qui campent dans l’imaginaire général en matière d’horreur. Mais c’est bien là que l’Horreur prend toute sa force : terrée dans le quotidien, en prédateur patient. Stephen King est le roi de l’Inquiétante Etrangeté.
Alors si vous ne savez pas quoi faire de vos longues et froides soirées d’hiver, Docteur Sleep sera le compagnon idéal pour vous faire frissonner même si vous avez mis votre chauffage au maximum. |