Après un disque en collaboration avec David Byrne, Love This Giant paru en 2012, St. Vincent revient dans l’actualité avec ce quatrième album solo. Beau parcours pour Annie Clark, seule aux commandes du projet St. Vincent, qui s'est faite connaître par sa participation en tant que guitariste au sein des Polyphonic Spree et du groupe de scène de Sufjan Stevens. On fermera les yeux sur la pochette de l’album avec ce nouveau look qu’on qualifiera au mieux de fâcheux, pour se plonger dans l’écoute de ces 11 nouvelles chansons.
Auteur, compositrice, multi-instrumentiste, Annie Clark a d’entrée toutes les cartes en main pour laisser libre court à son inspiration, sans compromis. De son propre aveu, Annie Clark a laissé très peu de place et de liberté aux musiciens ayant participé à l’enregistrement. Les vrais invités de choix de l’album, ce sont ces rythmiques électroniques et détonantes, et l’instrument de prédilection d’Annie Clark, cette guitare omniprésente et tranchante mais jamais trop bavarde.
Les morceaux sont toujours sur le fil entre le conventionnel et l'avant-garde, dans un mélange savant et singulier d’évidence mélodique et de recherche sonore. Pas de dogme immuable chez St. Vincent, aucun esprit de chapelle mais au contraire un regard tourné vers l’avant, une attirance vers la modernité et les chemins de traverse, toujours au service de la chanson.
L’album défile dans une alternance de morceaux forts et puissants comme l’intense "Birth in reverse" ou "Regret" et d’autres plus poignants tel "Prince Johnny" où Annie Clark laisse éclater toute son aisance vocale. Car la voix est toujours la grande gagnante chez St. Vincent, une composante essentielle de ces chansons singulières. Son amplitude, ses subtiles variations, sa profondeur laissent une empreinte gracieuse sur tous les titres. Si la comparaison avec Kate Bush est aussi facile qu’évidente ("I prefer your love"), on peut aussi évoquer Siouxsie pour sa densité et sa façon ensorcelante de mener la danse. Aucun remord ici à aimer "Psychopath", (une réponse au "Psychokiller" des Talkings Heads de David Byrne ?) ou à se laisser pervertir par les cuivres de "Digital Witness" avant que l’album ne se termine par un ambitieux "Severed Crossed Fingers", en état de grâce. On se rendra alors compte qu’Annie Clark ne se trompait en décrivant son disque comme "un album de fête que l'on pourrait tout à fait passer à des funérailles". De sacrées funérailles à coup sûr. |