Faire de la musique en famille est une recette qui a fait maintes fois ses preuves. Depuis les incontournables Fleetwood Mac, en passant par les Jackson 5, jusqu’à Arcade Fire, faire de sa passion un business familial, s’est avéré être un moyen de garder le cap sur la créativité et de faire front contre les décisions imposées par les maisons de disques.
A la fois prodige et rêve commun, développé et produit au sein d’une famille qui a su mettre le cap sur la même direction artistique, le second album plein de promesse du quatuor estonien, Kye Kye, s’applique à donner corps à nos propos. Formé de la fratrie de Timothy, Olga et Alex et qui s’accompagne du beauf Thomas, le groupe signe un album à la sensibilité exacerbée et avec une identité forte.
Fantasize est ce que l’on pourrait appeler un album de dream pop et cela tombe bien puisqu’on reste dans le même champ lexical. Néanmoins, celui-ci fait largement appel à une instrumentalisation électronique et chose plus incongrue, le groupe explore avec ses outils modernes une musicalité typique aux années 80.
Comprenez par là qu’on a le droit à de longues nappes de synthés couplées à des expérimentations shoegaze, le tout très souvent accompagné de percussions à faire pâlir d’envie toute production vidéo avec David Hasselof.
Mais le véritable attrait de Fantasize se situe en réalité dans la voix évasive d’Olga. Elle apparaît comme détachée d’avec les productions et semble devoir se battre pour se frayer un chemin sur des titres comme "Her" ou "People", sons alliant instruments classiques et électroniques dans un ballet qui occulte largement l’organe vocal, le renvoyant au second plan.
Mais quand celui-ci réussit à tirer son épingle du jeu, chants suaves et entêtants font la part belle à des titres qui deviennent portés par des mélodies hantées et rêveuses, pour ne pas dire éthérées. "Softly" et son refrain accompagné par de légères guitares en devient le parfait exemple, en même temps qu’une vitrine parfaite pour le style du groupe.
Car si on utilise assez facilement les sobriquets dream-pop ou électro pop pour définir le quatuor, la réalité est que Kye Kye peut se réclamer de toute une série d’influences, alignant le r’n’b à côté de la pop voire même à un peu d’acid jazz comme le sous-entend le titre "Glass".
Quelque chose de franchement dans l’air du temps donc, mais qui devrait réussir à ameuter du monde. Puisque le pari de Fantasize, c’est-à-dire susciter la passion et le rêve, s’avère aussi réussi que romantique. Normal me direz-vous, quand le groupe a voulu signer ce second opus comme étant principalement "un travail d’amour". Quand on vous dit que travailler en famille a du bon. |