De petite Chloé du Québec, elle choisit Klô Pelgag pour nom de scène, pour titre de l’album : L’alchimie des monstres. Il est dit qu’elle fait de ses chansons un "paysage pour les non-voyants, pour que les mots n’existent pas sans la musique, et réciproquement". Allons faire un tour du côté de la transmutation des métaux appliquée aux bêtes à sommiers : les monstres.
Chant, piano, cordes, bois, envolées lyriques, petites phrases essoufflées, murmures, chœurs, échos, la porte est grande ouverte, venez, entrez dans l’univers de Klô Pelgag. Ecoutez l’album comme vous lisez un roman : d’une traite, en voyage, loin de tout, vous en reviendrez transformé ou ne reviendrez pas.
Klô fait peser la douleur des violons sur des refrains, monte les octaves de sa voix pour alléger le drame : "elle est partie en leucémie, elle m’a laissé tous ses livres, elle est partie en chimiothérapie, c’est un nouveau pays" ("La fièvre des fleurs"). La maladie. Drame. Folie douce. Folie tendre. Folie folle. Allitération de la réalité. Comme les ailes de Malzieu ou le nénuphar de Vian, le cancer devient une fleur qui pousse sous la peau, un oiseau qui prend son envol.
"Au clair de la brume, j’ai pris la pilule, celle qui fait dormir, changer ma cellule où je vois les monstres revenir au monde" ("Les corbeaux"). Peur du noir. De la mort. De la nuit. Folie. Toujours. Extravagance des mots. Fantaisie de la musique. Tout est permis. Rire de tout.
"Le silence épouvantail", "Taxidermie", "La neige tombe sans se faire mal"… Klô chante légèrement la tragédie, fait s’évaporer les boulets de canons, met des ailes aux maladies incurables. Quel étrange voyage que l’écoute de l’album ! Trop court. Qui n’a pas besoin qu’on lui chante encore et encore la lumière au bout du tunnel ? La vie après la mort ? Ce foutu espoir qui fiche le camp à la moindre contrariété.
Musical, dingue, décalé, hors cadre et anti frontière, L’alchimiste des monstres vous donnera des envies de Yodel-fraise et de vodka-crème-de-frisette. Un brin d’absurde, un soupçon de génie, de la poésie mélodique, la recette de Klô Pelgag est simple : mélanger tout ça avec tout ça, cassez les cadres, brisez les codes, enchantez la ronde, portez des rondelles d’ananas en guise de longue vue, des escargots pour bijoux et des enjoliveurs comme sac à main. De la chair de poule dans les oreilles. |