Comédie dramatique de Patrick Hernandez, mise en scène de Maryse Santini, avec Pierre Hentz et Bernard Sender.
Un élégant visiteur en costume gris s'introduit sans y être vraiment invité chez Léonard Boulard, un "papy mougeot" confit dans ses mots croisés et confiné dans son appartement compassé de "vieux garçon".
Beau parleur, il s'y incruste sous couvert d'une mission à accomplir et qui consiste à lui apporter le bonheur.
De quoi exciter la curiosité du plus sceptique d'autant qu'il ne manque pas d'arguments et des deux armes convictionnelles massives que sont la force de persuasion et le pouvoir de séduction.
Mais sa superbe introduit également le doute. Cet avatar VRP du génie de la lampe qui prétend exaucer les voeux de tous et de chacun ne serait-il pas la Mort venue chercher son dû, le Diable qui sortira de sa manche un contrat faustien ou un tueur à gages jouant au chat et à la souris ?
Patrick Hernandez, auteur dramatique et scénariste, signe avec "La visite de l'homme en gris" une excellente comédie drolatique en forme de huis-clos pinterien basé sur l'inquiétante étrangeté induite par un fait objectivement banal, une intrigue à suspense avec un singulier "macguffin" à ne pas déflorer et de percutants dialogues truffés d'humour.
Mis en scène par Maryse Santini, ce huis clos est un régal jubilatoire grâce au jeu de deux comédiens chevronnés qui se délectent de chaque réplique de cette partition malicieuse au rythme ping-ponguesque.
Pierre Hentz campe le visiteur tel un dandy machiavélique avec la prestance du meneur de jeu, de surcroît fin psychologue, qui tire les ficelles d'autant plus allègrement que son "client" est un bon bougre.
Et Bernard Sender ne boude pas son plaisir pour incarner Léonard, tout à tour vieil enfant bougon, homme désenchanté et esprit crédule qui prend un certain plaisir à voir son ordinaire morose bousculer vers l'irrationnel et l'absurde.
Le duo fonctionne bien et le divertissement est assuré jusqu'à l'inattendu dénouement en pied de nez. |