Spectacle écrit et mis en scène par Serge Bourhis, avec, en alternance, Serge Bourhis, Guillaume Dollinger, Héloïse Lacroix, Alberto Lombardo, Julie Macqueron, Vincent Remoissenet et Caroline Hartpence.
Serge Bourhis avait fait mouche avec un "Racine par la racine" à la fois ambitieux et sans prétention ostentatoire, conçu comme une épatante et fantaisiste invitation au voyage en Racinie.
Toujours aux manettes pour l'écriture et la mise en scène, il récidive avec "Molieratus" qui propose un florilège de scènes empruntées aux opus majeurs moliéresques et dispensées selon un argument astucieux dans une partition fictionnelle qui emprunte au biopic et, de surcroît, satisfait à la dramaturgie de l'époque avec le respect de la règle des trois unités.
Elle est calquée sur le déroulement de ce que pouvait être une journée ordinaire de l'homme, du chef de troupe et du comédien - clin d'oeil à une situation intemporelle que connaît in vivo Serge Bourhis - émaillée des petits événements d'un quotidien récurrent qui entrent en résonance avec les intrigues théâtralisées.
Mais, cette journée ne se présente pas vraiment comme les autres. Dans sa loge, se préparant à ce qui sera sa dernière représentation du "Malade imaginaire", Molière cauchemardant est assailli par un grotesque ballet de masques qui annoncent la camarde.
Car contrairement à son personnage, Molière est gravement malade et, évoquant "l'heure du souper" qui scelle le destin de Dom Juan, a la pré-science de sa fin imminente. Comme il sait que c'est sa bien-aimée Madeleine, avec la beauté voilée et les mots de Elvire, qui viendra le chercher.
Ainsi il doit affronter, entre autres, les querelles d'ego entre la comédienne aguerrie Catherine de Brie et sa nouvelle et jeune épouse, Melle Molière née Armande Béjart, l'infidélité de cette dernière, les doléances d'un fâcheux créancier et la visite impromptue de Melle de Scudéry qui toutefois ne lui tient pas rigueur d'avoir servi de source d'inspiration pour égratigner les femmes précieuses et savantes.
Serge Bourhis orchestre la partition avec le rythme enlevé qui s'impose et sied à ce bienvenu divertissement au didactisme discret et le tempo est assuré par Alberto Lombardo qui endosse avec aisance toutes les pourpoints et campe un excellent Molière dans toutes ces facettes, de l'homme sensible au cabotin.
La troupe est au diapason avec Julie Macqueron, Guillaume Dollinger, Héloïse Lacroix et Vincent Remoissenet et mention spéciale à ces deux derniers pour leur palette "multirôle", de Dorine à un aussi superbe qu'inattendu Dom Juan au féminin pour l'une et de Monsieur Dimanche à Sganarelle pour l'autre.
Alors sus à l'Essaion ! |