Comédie de Nicolaï Erdman, mise en scène de Yann-Joël Collin, avec Justine Bachelet, Ulysse Barbry, Camille Bernon, Sanda Codreanu, Wallerand Denormandie, Lucie Digout, Aurélien Gabrielli, Elsa Guedj, Félix Kysyl, Grégoire Lagrange, Clara Lama Schmit, Makita Samba, Antoine Sarrazin, Arthur Verret, Veatriki Stamatiadi et Chiara Zerlini.
Dans le cadre des Journées de Juin 2014, Yann-Joël Collin met en scène une partie des élèves de deuxième année dans "Le suicidé" de Nicolaï Erdman.
Cette échevelée comédie satirique écrite en 1928 fustige le dogme du soviétisme qui inféode l'individu au bien commun à travers l'épopée burlesque de Sémione Sémionovitch Podsékalnikov.
Au chômage mais peu enclin à travail, se laissant entretenir par son épouse, Sémione se laisse vivre même s'il éprouve quelques infimes remords qu'il manifeste en évoquant le suicide tant par auto-apitoiement que pour se dédouaner vis-à-vis de son entourage mais sans vraiment l'envisager.
Jusqu'au moment où tous le prennent au mot et le somme de passer à l'acte. Mais bien que la farce tourne au cauchemar, le bougre "individualiste" résiste car à l'instar du personnage d'une chanson de Georges Brassens il veut bien mourir pour des idées mais de mort lente.
Le spectacle commence fort classiquement avec Félix Kysyl et Clara Lama Schmit qui sont époustouflants dans le premier acte qui tient d'une déclinaison à la russe de la laborieuse entreprise levinienne qu'est le couple et est placé sous le signe du réalisme burlesque.
Puis, la partition prend les chemins de traverse sous l'effet des fondamentaux que Yann-Joël Collin met en oeuvre dans tous ses spectacles au rang desquels la suppression du fameux "quatrième mur" avec le jeu qui phagocyte la salle puis l'extérieur, sans aller, en l'espèce, comme pour "Le conte d'hiver" présenté dans le cadre des Journées de Juin 2008, à annexer la rue et l'église voisine avec déplacement du public et l'usage intensif de la vidéo notamment avec le procédé de la caméra au poing emprunté au polonais Krystof Warlikowski qui lui-même l'a emprunté à l'allemand Frank Castorf pour filmer en gros plan les comédiens jouant hors du champ visuel des spectateurs.
Ainsi impulsé, le jeu très ludique propre aux pièces de troupe auxquelles ressortit "Le suicidé" fédère les élèves qui s'en donnent à coeur joie dans le surjeu et la parodie en soutenant un rythme malestromique, qui cependant, sur la longueur, tourne parfois à vide, et cela donne quelques scènes hilarantes telle celle des employés des pompes funèbres déguisés en anges-danseurs.
Ulysse Barbry, Walleyrand Denormandie, Antoine Sarrazin et Arthur Verret campent successivement le personnage-titre sous forme de variations. Lucie Digout devient la veuve éplorée et la belle-mère loufoque campée par Justine Bachelet se transforme en ménagère de l'american way of life des années 1960 avec une épatante composition de Camille Bernon.
Sanda Codreanu, Aurélien Gabrielli, Veatriki Stamatiadi, Chiara Zerlini, Grégoire Lagrange, Elsa Guedj et Makita Samba, avec mention spéciale pour ces deux derniers, complètent la galerie de personnages archétypes de l'ancienne Russie brossés par Erdman. |