Samba de la muerte pour vous servir." C'est tout ce qu'on aura entendu en arrivant (en retard) à Beauregard. Sur la grande scène, les caennais ont commencé cette deuxième journée de festival. Des applaudissements nourris ont salué un concert dont, on s'en excuse d'abord auprès du groupe, on ne pourra malheureusement rien vous dire.
Be Quiet, cinq bordelais prennent ensuite d'assaut la scène B. Leur indie pop à l'anglaise sonne bien. C'est carré, pro, les guitares alternent avec les nappes planantes de synthé. Même leur attitude est très anglaise.
Il y a de bonnes chances qu'on entende de nouveau parler d'eux bientôt, car leur morceau "Zelda" a toutes les qualités pour s'installer durablement sur dans nos lecteurs MP3.
On ne quitte pas Bordeaux puisque c'est le nouveau projet de Serge Teyssot-Gay et Cyril Bilbeaud qui est ensuite présenté au public normand. Zone Libre était foutrement abrasif, mêlant grosses guitares, batterie et rap.
Après un petit mot de soutien aux intermittents du spectacle, le concert commence.
Zone Libre Extented, avec l'extraordinaire Mike Ladd creuse le même sillon, mais avec la voix plus chaude. C'est Marc Nammour qui se charge de la partie française des textes. Lui aussi a un flow qui castagne. Du rap aux textes engagés, une guitare, une batterie, on a affaire à des gladiateurs du rock.
Un concert durant lequel quelques grosses averses refroidissent, au propre comme au figuré, le public qui cherche refuge sous les arbres du site et déserte un peu les premiers rangs. Mais les rythmes hypnotiques, les textes rentre-dedans et les signes aux spectateurs pour les inviter à revenir remotivent le public. Tous ces ingrédients font de Zone Libre Extented la grosse claque de ce début de deuxième jour.
We Have Band est toujours un aussi bon groupe de scène. Leur dernier album Movements est fait pour bouger. Même sous un ciel gris ou sous le crachin normand, voire les averses. Désormais accompagné d'un batteur sur scène, le trio passe des chansons du dernier album à celles du désormais classique WHB. Le public met un peu de temps mais devant l'énergie déployée par le groupe, très vite tout le monde tape des mains, bouge les fesses et oscille du chef. Le groupe semble même surpris de l'accueil.
Les deux claviers de Dede et de Darren sont très en avant de la scène, tandis que Thomas s'éclate sur sa basse à l'arrière. La moue de Dede et le sourire de Darren sont repris très souvent en gros plan sur les écrans qui entourent la scène. Le groupe saute, se donne à fond. "Ho !" reçoit un accueil grandiose. Mon Dieu, même moi je danse. Qu'est-ce qui m'arrive ? Même si leur album Movements ne fait aucunement référence au Movement de New Order, We Have Band a néanmoins saisi toute la substantifique moelle de cette indie pop synthétique faite autant pour danser qu'à écouter chez soi.
Darren ôte ses baskets et saute pieds nus sur scène, Dede feule et allume le public, Thomas s'aligne sur ses deux compères dans une attitude que ne renierait pas Peter Hook. Surpris d'avoir encore du temps pour une dernière chanson, ils n'hésitent pas une seconde et se jettent sur les instruments. Le final instrumental en duo basse / batterie permet à Darren et Dede de sortir de scène. On les aperçoit néanmoins qui dansent encore dans les coulisses. Grosse prestation des anglais de We Have Band.
Foster The People est un groupe qui a visiblement attiré un public familial sur le site de Beauregard.
Les tubes "Pumped Up Kicks" ou "Call it what you want" plaisent. Les spectateurs tapent dans les mains, reprennent les airs entendus dans diverses pubs. Difficile désormais d'approcher de la scène. Le show est bien rodé, le groupe fait honnêtement le job.
Le public est heureux. Rien à redire. Certainement un peu verts pour tenir la grande scène plus tard, les américains de Los Angeles montrent cependant qu'ils bénéficient d'un beau soutien populaire.
Angus et Julia Stone rentrent sur la petite scène. Ils sont accompagnés d'un second guitariste / banjo, d'un bassiste, d'un batteur et d'un clavier. Leur folk très pure et très douce correspond aux attentes d'une autre partie du public. En cours de concert, quelques fans de Vanessa Paradis préfèrent aller se placer. On sait déjà que le concert de la gagnante des Victoires de la Musique affichera complet.
Big Jet Plane" ou "Paper Aeroplane" parlent bien entendu au public. Lorsque Julia s'empare de la trompette sur "Private Lawns", le public accompagne en frappant dans ses mains. Aucun doute, les spectateurs sous le charme, presque autant que le cameraman qui multiplie les plans serrés sur Julia. Leur folk, riche, émouvante, ouverte aux autres rythmes, la magie des deux voix, tout fonctionne parfaitement. Encore une prestation dont les spectateurs se souviendront.
Vanessa Paradis vient présenter son album en Normandie. "On est heureux d'être chez vous." Lance-t-elle au public venu l'applaudir. Les chansons du dernier album, écrit par Benjamin Biolay, s'enchaînent. Non pas que je reconnaisse les chansons, mais je reconnais la patte. Benjamin Biolay est d'ailleurs de la partie, aux claviers derrière Vanessa.
Difficile pour moi de parler d'elle, les dernières nouvelles que j'avais d'elle musicalement remontent à Atomik Circus où elle chantait accompagnée des Little Rabbits. Concia (prononcez "Conchia"), du nom de son personnage dans le film, offre un concert de bonne tenue. On ne la sent pas forcément complètement à l'aise mais elle est bien entourée par des musiciens qui assurent. La blonde au blouson à tête de mort (rebelle Vanessa) terminera avec des tubes plus anciens "Marilyn et John" ou "Tandem". Finalement plus agréable que ce qu'on craignait, ce concert finalement assez festif a comblé le public familial venu la voir.
Paul Weller a commencé fort avec des morceaux courts et brutaux, dont l'excellent "Wake Up The Nation" avant de rapidement lever le pied. On ne l'attendait pas aussi en forme, le bougre. La voix bien posée, assurant tout le devant de la scène sans faillir. L'ancien leader des Jam, tenant indéboulonnable de la britpop, est entouré de bons vieux requins, dont deux batteries. La reprise de "My Ever Changing Mood" des Style Council et la version de "Start !" des Jam en toute fin de concert ne suffisent cependant pas à réveiller un concert bien fait, mais sans moment de grâce.
Le concert de Portishead est tendu. Beth Gibbons n'apparaît en rien apaisée malgré les années. Le trip-hop, musique dont on a annoncé la fin depuis de nombreuses années n'est jamais apparu à ce point actuel et innovant. La faute à Paul Weller programmé juste avant ?
Quoiqu'il en soit les ambiances sont lourdes, soulignées par des lumières vertes, bleues, froides. Beth Gibbons tient le micro et n'ouvre jamais les yeux. Les effets sur les écrans ont dû légèrement fatiguer les spectateurs un peu trop loin de la scène pour apprécier le concert. On a beau connaître Portishead, qui refait souvent le même concert, c'est souvent un plaisir de les revoir, surtout lorsque Beth Gibbons est en forme, et descend dans les crash barriers en fin de spectacle taper dans les mains des spectateurs des premiers rangs. "Wandering Star" a bien sûr fait hurler de plaisir le public. Et nous, nous en avions des frissons le long de l'échine.
Pour Fauve, il ne faut pas craindre de se frotter à de l'étudiante avinée et à du lycéen boutonneux. On pâlit en entendant la teneur des conversations autour de nous. Pas grand-chose à voir avec les paroles du collectif parisien : "Au fait, Téléphone, ils sont toujours tous vivants ?", "Tu comprends, dans le rock français, il y a eu Gainsbourg, Bashung et Noir Désir. - Et Renaud, aussi. - Oui Renaud, mais quand il chantait encore...". WTF ? C'est quoi cette bande de petits vieux, qui en plus sifflent parce que le concert va commencer avec trois minutes de retard ? Et pourtant à Beauregard aussi, Fauve fait figure de groupe porte-parole d'une génération. Le chanteur porte un t-shirt Stupeflip. Rien d'étonnant puisque les deux groupes participent de cette même esthétique de l'anonymat.
Chez Fauve, des flash, des lumières rasantes, des spots en fond de scène afin de ne pas être reconnus. Après "De Ceux", "Haut les coeurs" fait chanter le public. "C'est un honneur d'être là. On a des attaches très fortes avec le coin. On va faire en sorte que ce soit une soirée que vous n'oublierez jamais." Le groupe se donne malgré les averses qui redoublent d'intensité. Certes, ce n'était pas LE concert du festival, mais les spectateurs ont reçu ce pourquoi ils étaient venus, du son, du rythme et une pointe de mystère.
Gesaffelstein et son electro dark tellement proche de l'Electronic Body Music d'il y a 30 ans que tout le monde peut s'y retrouver n'aura malheureusement pas l'heur de me voir dans le public. Les averses ont eu raison de moi après une journée déjà assez intense. Direction le lit avant le dernier jour de Beauregard. |