Comédie de Denis Lachaud, mise en scène de Thomas Condemine, avec John Arnold, Valentin de Carbonnières, Christian Caro, Bertrand Farge et Yvon Martin.
Dans un décor de grand salon de réception haussmannien sommairement brossé par Camille Vallat, deux hommes, le père-père - John Arnold parfaite caricature du bourgeois compassé doublé d'un phallocrate répugnant et d'un tyran domestique - et le père-mère - Christian Caro époux dévoué et soumis - s'inquiètent de l'avenir de leur fils unique.
Face à l'inaction filiale, commercial peu performant et célibataire peu motivé pour assurer la descendance de leur dynastie, ils mandatent un professionnel patenté.
Celui-ci, Bertrand Farge désopilant de décontraction sournoise en marieur interlope, déniche une perle rare à double titre car il s'avère non seulement être le directeur de l'entreprise dans laquelle travaille le rejeton mais un futur époux-épouse qui a du caractère.
Voici l'intrigue de "Hetero" qui n'est ni une dystopie sur une humanité qui ne serait plus constituée que par des individus de sexe masculin, puisque tous les enfants garçons sont soumis à principe de sexuation, ni une pièce sur la sexualité, mais une satire, sous forme burlesque, de la norme sociétale.
Et ce à travers le schéma familial traditionnel composé de deux figures parentales stéréotypées, celle du père et de la mère, nonobstant leur sexe génétique, aucun substitut n'ayant été trouvé à ce jour aux schémas archaïques assurant la perpétuation de l'espèce, principe absolu de vie.
Dans un premier temps, l'opus de Denis Lachaud que Thomas Condemine met en scène comme une farce tragi-comique avec des personnages de pantins au visage blanchi, version allégée du masque de clown brechtien, déconcerte, trouble et intrigue.
Avec le jeu des acteurs, la machine s'emballe avant de tourner en rond. Car la dynamique de la farce s'épuise du fait que l'auteur n'ait pas su resserrer son texte tout comme il semble ne pas être parvenu à conclure de manière tranchée, proposant un dénouement à double détente.
Cela étant, le spectacle est souvent jubilatoire en raison de son registre, celui de la fantaisie grotesque qui convient mieux à Yvon Martin, parfaitement à l'aise en trublion, qu'à Valentin de Carbonnières à qui incombe le rôle du "beau parti".
Le "must" du spectacle c'est naturellement le couple campé par Christian Caro, époustouflant en épouse sacrificielle, et John Arnold qui, doté d'une partition propice au numéro d'acteur délirant et appuyé, se laisse aller au péché mignon de cabotinage. |