Monologue dramatique de Victor Haïm interprété par Benjamin Bollen dans une mise en scène de Stéphanie Wurtz.
Après "Fureur" toujours à l'affiche, le duo Benjamin Bollen au jeu et Stéphanie Wurtz à la mise en scène rempile avec "La femme qui frappe", pièce monologale du célèbre dramaturge français Victor Haïm.
Ce qui est une belle opportunité pour le public de découvrir un duo qui fonctionne en synergie percutante dans le difficile genre du seul en scène, une metteuse en scène qui, au sein de la Compagnie Ornithorynque, de Molière à Pinter en passant par Maupassant et Haïm, signe un parcours sans faute ("Duo pour Dom Juan", "Le mauvais passant", "Le monte-plats"), et un jeune comédien
Avec son physique juvénile qui n'est pas celui d'un déménageur transformiste, Benjamin Bollen, petit gabarit et traits fins, campe crédiblement le savoureux personnage d'Agathe, opiniâtre et consciencieuse femme qui frappe, dactylo à domicile scotchée à sa machine mécanique.
Soliloquant face à un mystérieux interlocuteur muet, ce qui introduit une touche de suspense, Agathe lutte pied à pied, plutôt touche après touche, avec le manuscrit aussi ampoulé que surabondant, "une Bible racontée par un bègue à un mec dur de la feuille", d'un écrivain "pisseur d'encre" qui se laisse aller à une absconse logorhhée plumitive.
Tout commence avec une Agathe guillerette, style vintage cheap, choucroute et lunettes papillon des années 1960, qui reprend en choeur les tubes antiques de la chanson française, de Dalida, Nana Mouskouri et Nicole Croisille, et motivée jusqu'au moment fatidique du cheveu dans la soupe, une virgule intempestive qui l'interpelle et l'amène à contacter téléphoniquement l'auteur.
Fatale erreur, car l'auteur est particulièrement retors, qui va l'amener, en premier lieu, à rêver et faire son cinéma avant de se retrouver au bord de la crise de nerfs voire de la folie.
Stéphanie Wurtz met en scène avec acuité ce solo tragi-comique qui est porté par l'époustouflante nature comique, la gestuelle clownesque millimétrée et la remarquable virtuosité verbale de Benjamin Bollen, indispensables dispositions pour maîtriser le verbe savoureux de Victor Haïm au demeurant très travaillé et plus complexe qu'il ne paraît.
Par ailleurs, cette copieuse partition, qui navigue entre le réalisme social et la folie burlesque, permet à Benjamin Bollen de révéler, et ce sans verser dans l'excès ou la parodie, une belle capacité à émouvoir et un vrai talent dramatique. Une belle palette, donc un jeune comédien à suivre.
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