Avides d’images de contes et de rêveries, goûter à l’imaginaire d’Ez3kiel assouvit gargantuesque-ment ce genre d’appétits.
Ez3kiel, de retour à l’Aéronef de Lille, ne m’a pas beaucoup donné à réfléchir pour revenir à leur écoute. J’étais curieuse de connaître la nouvelle formule, surtout après la sortie récente de leur album Lux. Je m’imaginais déjà les nouvelles créations sorties de l’esprit ingénieux et fou de Yann Nguema. Outre l’efficacité trip-hop du groupe, c’est bien l’ambiance graphique et la recherche d’une symbiose parfaite avec la musique qui reste encore ancrées aujourd’hui dans l’esprit des connaisseurs du groupe. Des personnages féériques et froids. Ambiance d’automne, nostalgique. Des images, des atmosphères, des corps animés par le jeu des musiciens. Voilà ce qu’était encore pour moi Ez3kiel, une marque de fabrique peut-être un peu trop accrochée dont ils voulaient se défaire...
Avant que le concert ne débute, j’en ai eu quelques indices. D’abord, j’aperçois Yann Nguema hors scène. Tellement passionné par la dimension visuelle, il a raccroché la basse pour se consacrer aux manettes et à la programmation. La scène est, quant à elle, beaucoup plus aérée en instruments, laissant place à un trio de musiciens. Et, dans l’ombre, une masse de projecteurs nous surveillent. 48 au total que le groupe à nommer le "Magic-Screen". Je commence à réaliser le virage du groupe et son Lux.
Et voilà que la musique démarre. Le son est retentissant. Après avoir été aussi méticuleux avec le Naphtaline Orchestra, j’imagine que le groupe a voulu se lâcher pour exploser littéralement. Comme si une crise d’adolescence avait éclaté ou comment se libérer du carcan Ez3kiel. Disparu la finesse musicale – certes, il y avait eu Ez3kiel et Hint et encore, il y avait de doux passages – si ce n’est dans les introductions et les passages énigmatiques de crissements et de doux xylophone, place à une artillerie lourde : une batterie brutale, une guitare saturée et principalement, des infrabasses à gogo. Le jeu est simple et surtout efficace. Il n’y pas à dire, les spectateurs sont en transe, limite headbanging quand ils le peuvent. Mais peut-être que c’est un peu trop fort, un peu trop intense.
Du reste, le spectacle visuel est toujours aussi travaillé. Mais là, j’ai envie de dire que Jean-Michel Jarre a été largement précurseur ! C’est bien un jeu de projecteurs et de lasers ultra perfectionnés que nous offre le groupe et qui accompagne sauvagement le jeu des musiciens. J’imagine que derrière cette représentation, un travail monumental de programmation a dû être réalisé.
Chaque projecteur est articulé, produisant des effets impressionnants : sphères, vagues, nappes de lumières, sans compter ces multitudes de faisceaux lasers qui voyageaient dans toute la salle. Je me suis crue plusieurs fois dans un spectacle de science-fiction, Star Wars 2014. Parfois, les projecteurs reconstituaient un puzzle d’images dignes de leurs univers d’autrefois, féériques et froids. Clin d’œil nostalgique.
J’ai peut-être trop projeté ce qu’allait être cette nouvelle rencontre avec Ez3kiel. Habituée à une diversité de configurations de musiciens et d’ambiances sonores, je ne m’attendais pas à ce que le groupe fasse le choix de la simplification à l’extrême. C’est pour autant une forme d’originalité et un désir de changer. C’est courageux. Cette nouvelle configuration est sans conteste une prouesse de travail et de recherche. Mais j’avoue avoir moins bien accroché. Amateur de spectacle "sons et lumières", je suis sûre, pour autant, que vous n’en sortirez pas déçus.
En première partie, Dorian and the dawn riders. Timide homme-orchestre au look de cowboy, je me suis faite la réflexion que l’homme ne devait pas être très à l’aise avec la scène. Le premier morceau n’était pas une grande réussite et on ne sentait que trop fortement son approche fragile. De morceau en morceau, l’ambiance plus marquée et travaillée s’est finalement déployée. Seul, Dorian s’accompagne d’ambiances pré-enregistrées qu’il lance depuis son clavier. Il y pose alors sa voix qui, du reste crée des ambiances intéressantes entre graves et aigus. Parfois, il s’accompagne de sa guitare. Derrière lui, des images saturées racontent leur histoire. C’est une atmosphère lente et inquiétante qui s’en dégage, entre Interpol et Wood kid.
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