Comédie de Pierre Barillet et Jean-Pierre Grédy, mise en scène de Jeanne Herry, avec Hélène Alexandridis, Olivier Broche, Céline Martin-Sisteron et Loic Riewer.
Pour sa première mise en scène Jeanne Herry, actrice et réalisatrice, a choisi une pièce de boulevard en puisant dans le copieux répertoire du célèbre et fameux tandem constitué de Pierre Barillet et Jean-Pierre Grédy qui, porté par des monstres sacrés, a connu son âge d'or dans les années 1960-1970.
Et elle a exhumé "L'Or et la Paille", qui n'a été joué que lors de sa création en 1956, dans laquelle les auteurs ont décliné le mécanisme comique de l'arroseur arrosé. Un couple de jeunes gens beaux et désargentés vit de l'air du temps et de l'argent et des largesses des autres.
Ayant le goût de la belle vie sans céder à l'obligation vulgaire de travailler pour subvenir à leurs besoins, ces "petits joueurs", écornifleurs et petits arnaqueurs entre amis vivent d'expédients qui arrivent à leur terme. Aussi envisagent-ils de monter en puissance en visant "haut", devenir cocotte et gigolo pour décrocher la sponsorisation par des barbons à cassette.
Mais leurs cibles, un industriel "roi du tuyau", malgré son air benêt et sa vue basse, et la riche veuve colombienne, malgré son goût des beaux garçons, qui partagent en sus la même pingrerie, ne sont pas des pigeons de l'année.
Jeanne Herry a procédé à un changement de registre en écartant celui de "Au théâtre ce soir" car elle voit dans cette partition une comédie de moeurs qui, sur fond de marivaudage, aborde les thèmes contemporaines de la perte des valeurs, la dévalorisation du travail et de la quête du bonheur matériel.
Elle a donc pris le parti de la faire résonner différemment pour "retrouver une fraîcheur nécessaire" avec des acteurs qui ne se sont jamais "frottés" aux rôles de boulevard.
Mais, d'une part, elle détruit la mécanique du rire propre à la comédie de boulevard sans y substituer une ligne claire et, d'autre part, la distribution est anachronique à l'instar du décor et des costumes conçus par Jane Joyet, qui placent des dames élégamment vêtues de robes corolle "New look" années 1950 dans un appartement contemporain.
Le jeune couple, de surcroît quasiment seul au premier acte, est interprété par deux comédiens récemment promus d'écoles de théâtre (Céline Martin-Sisteron et Loïc Riewer) qui, à défaut d'expérience, de nature comique et d'abattage, ne trouvent pas leurs marques.
En revanche, le "second couple", entraîné par Hélène Alexandridis, excellente comédienne qui peut partir en vrille dans la démesure et la folie, comme récemment dans le rôle de la reine dans "Yvonne, princesse de Bourgogne" mise en scène par Jacques Vincey, sauve la mise adu deuxième acte.. Pour elle, l'évidence comique s'impose et elle a parfaitement intégré, en termes de jeu, les codes et exigences du boulevard.
Elle campe l'ex-chanteuse de la croquignolette "revue des légumes" reconvertie par la grâce du mariage en milliardaire sud-américaine avec une pétulance et une force comique époustouflante et jubilatoire, entraînant Olivier Broche dans son sillage. |