Seule en scène écrit et interprété par Meriem Menant dans une mise en scène de Kristin Hestad.
Nombre de spectateurs ont sans doute découvert le personnage de Emma la clown, "le clown" de la comédienne Meriem Menant formée à l'Ecole internationale de théâtre Jacques Lecoq, au début des années 2000 dans l'opus "Sous le divan".
Avec sa silhouette de cheftaine dégingandée toute en bras et jambes, son galurin enfoncé jusqu'aux yeux et un nez rouge en forme de patate écrasée couleur lie de vin, Emma est "une" clown poético-métaphysique qui s'inscrivait dans la mouvance du nouveau clown dans laquelle la dimension comique perd sa finalité unique de divertissement pour devenir un élément de subversion et de réflexion sur l'homme et le monde.
Après cette quête existentielle, une quête mystique ("Dieu est-elle une particule ?"), une échappée dans les mondes parallèles ("Emma la clown, voyante extra-lucide"), un détour musical ("Emma et son orchestre") et, sans doute influencée par sa conférence-spectacle à deux voix avec l'haptopsychothérapeute Catherine Dolto ("La conférence"), l'inquiète et angoissée Emma s'érige en philo-praticienne en s'essayant à la pédagogie funéraire pour éclairer et rassurer le commun des mortels effrayé la finitude humaine et levant le mystère de la mort par la pratique.
Ainsi énonce-t-elle en préambule : "Je te propose de te montrer comment ça se passe et de tout t’expliquer, le corps l’âme et tout le tintouin. Pour te rassurer quoi. Et être content de mourir. Et de vivre en fait".
Mais non seulement, et évidemment, Emma n'a pas la science infuse mais elle manque de la sérénité indispensable pour traiter d'un tel sujet. Car Emma a les miquettes et sa tentative de démonstration façon représentant en convention obsèques ne s'avère huère rassérénante.
D'autant que le moment venu, quand ses dernières volontés, termes afférant davantage au condamné qu'au bienheureux, se réalisent, ce n'est pas le coeur léger avec de séraphiques ailes, comme dans le premier spectacle précité, mais les épaules basses et la mine inquiète qu'elle tire sa révérence.
Avec "Emma Mort même pas peur" mis en scène par Kristin Hestad, Meriem Menant propose un spectacle de clown qui, nonobstant l'idée du doudou, un double sous forme de poupée de chiffon grandeur nature, d'une digression chamanique vêtue d'une houppelande de peluches façon Frères Campana qui tourne un peu court et de la belle image en guise d'épilogue, s'éloigne de l'imaginaire poétique.
En revanche, elle renoue avec les fondamentaux du clown circassien que sont le comique de répétition, les accessoires amusants, en l'espèce, les objets à malice de Didier Jaconelli dont une voiture de marchand de glaces customisée en batterie aux crânes hirstiens, et le jeu avec le public. Et celui-ci en redemande. |