Le Musée Dapper, institution privée qui ne dispose pas de collection permanente, a pour vocation dédiée l'organisation et la présentation d'expositions temporaires consacrées aux arts aux cultures de l'Afrique subsaharienne, des Caraïbes et de leurs diasporas.
Toutefois, émanation de la Fondation Olfert Dapper créée en 1983 sous l'impulsion de Michel Leveau, elle détient une collection unique d'objets d'art africain dont elle présente pour la première fois
un florilège constituée de pièces majeures réunies sous le titre "Chefs d'oeuvre d'Afrique".
Organisée en deux sections géographiques chacune ordonnée autour d'appariements fonctionnels et stylistiques, la monstration conçue sous le commissariat de Christiane Falgayrettes-Leveau, directeur du Musée Dapper, s'adresse de manière privilégiée aux spécialistes.
Mais néophytes et amateurs ne seront pas désorientés grâce au souci de didactisme qui guide ce musée et se traduit par l'apposition de cartels explicatifs et de nombreuses notices d'oeuvres qui permettent d'aborder les fondamentaux des arts traditionnels africains.
Chefs d'oeuvre d'Afrique, Magique Afrique
Une première constatation s'impose au visiteur : l'art africain est essentiellement celui de la statuaire, discipline à l'indéniable efficacité visuelle, qui inclut représentations figuratives, masques et objets rituels qui n'ont pas vocation purement décorative ou ornementale.
En effet, le regard attentif sur la description de chaque oeuvre permet d'appréhender la polysémie fonctionnelle de cet art dont la production est destinée à concrétiser, et véhiculer, l'omnipotence de la relation avec un surnaturel lui-même polymorphique qui peut être fétichisme, magie, mysticisme ou(et) religieux.
Par ailleurs, ces objets peuvent également constituer des insignes
sociaux attestant du savoir détenu par son possesseur avec des objets, comme le masque à cornes du Mali, qui sont des instruments éducatifs et ludiques.
Mais également des emblèmes du rang social, et donc politique, ce qui constitue une des caractéristiques communes des sociétés primitives très ritualisées.
La plupart des objets "investis" participe à des rites tant sociaux que religieux.
Ainsi en est-il avec le rite initiatique marquant le passage à l'âge adulte et l'intronisation sociale, le rite funéraire et le culte des ancêtres avec l'utilisation d'objets, telles les superbes figures reliquaires à double face du Gabon, pour procéder au rite classique de commémoration mais également accomplir des rites intercessionnaires pour obtenir notamment protection.
Enfin, la spécificité tient non seulement aux qualités plastique et esthétique des oeuvres, qui séduiront le public contemporain comme elles ont séduit les avant-gardes artistiques du début du 20ème siècle, mais à leur grande variété stylistique. La récente exposition "Les Maîtres de la sculpture de Côte d'Ivoire" qui s'est tenue au Musée du Quai Branly montrait, au-delà de certaines codes communs, la singularité de chaque maître-sculpteur qui correspondait à des spécificités ethniques et culturelles.
Les chefs d'oeuvre du Musée Dapper confirme cette diversité et certaines particularités, ainsi, par exemple, les figures équestres du Pays Dogon intégrant une dimension historique, celle des ancêtres primordiaux qui étaient des cavaliers.
L'abondance iconographique est particulièrement bien illustrée avec les figures sculptées et les artefacts..
Les masques révèlent un large répertoire de formes et de styles, du style expressif, voire naturaliste des masques en bois polychrome de Cote d'Ivoire,, à l'abstraction avec les masques-heaume royaux en bronze du Congo et à l'épure absolue des magnifiques masques blancs du Gabon.
A ne pas rater, entre autres, la statue gabonaise à l'effigie d'une princesse tenant une sonnaille (de face supra sur la première photo), le joyau de la collection, les statuettes du Dogon symbolisant un orant aux bras levés et les délicates têtes en terre cuite du Ghana. |