C’était l’histoire d’un auteur en panne d’inspiration. Pas la petite panne, celle qui relève plutôt de la peur d’écrire des bêtises que de celle de ne plus jamais avoir la capacité de former une suite de mots sur du papier, la grosse panne, l’impuissance totale à aligner deux pensées cohérentes… L’auteur en question irait dans ce coffre bien bouclé, récupérer d’anciens manuscrits de sa fougueuse jeunesse, et les refilerait à son agent qui les publierait les yeux fermés. Cet auteur réputé n’a plus besoin de relecture.
Cette histoire pourrait être celle de Jean d’Aillon avec ce roman qui n’en est pas vraiment un. J’aime ses histoires alambiquées, ses indices cachés, ses ambiances médiévales aux odeurs et aux couleurs perdues, ses rythmes, ses mots, son chevalier troubadour Guilhem d’Ussel… Mais où donc cela est-il passé dans ce dernier L’évasion de Richard Cœur de Lion (et autres nouvelles) ?
J’ai vaguement eu l’écho de l’impitoyable politique éditorialiste de certaines maisons, un livre par an ou bien ceinture… Je me sens flouée. Ce roman est bien de Jean d’Aillon, mais un peu moins que la dernière fois. Je m’attendais à un tourbillon de cape et d’épée, me voilà en train de contempler le va-et-vient d’une feuille qui s’ébroue dans la brise.
Et pourtant, tout y est. Le style de l’auteur, qui manie le vocabulaire médiéval à grandes brassées, le juste équilibre entre échanges dialogués et promenades à cheval qui se passent de commentaires, Guilhem d’Ussel est là, mais c’est trop court, trop linéaire, pas assez rebondissant. Des révélations sur la fratrie de Richard Cœur de Lion, son évasion un peu trop facile, l’histoire d’un homme-chat botté, des voleurs, des menteurs dans des tavernes poussiéreuses, un presque loup de Gévaudan.
Les 6 nouvelles complètent les précédentes aventures du chevalier troubadour, oui mais pourquoi ne pas les avoir inclues dans les romans originaux ?
Ce que vous trouverez tout de même dans ce recueil, c’est tout le talent d’un Jean d’Aillon sachant manier les superstitions médiévales et la perspicacité d’un redresseur de torts. Une plongée dans le passé toujours présent. Pour le découvrir, pour retourner dans ses anciens écrits, pour attendre la suite… |