Comédie dramatique de Tennessee Williams, mise en scène Daniel Jeanneteau, avec Solène Arbel, Pierric Plathier, Dominique Reymond et Olivier Werner.
"La Ménagerie de verre" de Tennessee Williams s'avère une partition difficile à mettre en scène notamment en raison de sa structure qui comporte de larges emprunts au cinéma inférés par sa nature originelle qui est celle d'une scénario issu d'une nouvelle autofictionnelle.
En effet, par sa succession de scènes brèves qui retracent les derniers épisodes, dans l'Amérique des années 1930, d'une chronique familiale psychotique avant son implosion, elle évoque un story-board.
Comportant, en outre, des inserts en forme de flash-backs, elle s'affranchit tant de le temporalité que la dramaturgie classique et est de surcroît impérativement placée par l'auteur, qui se refuse au réalisme psychologique, dans un registre anti-naturaliste qui serait celui du souvenir subjectivisé coloré de licence poétique.
Et cela pour traiter d'un sujet prosaïque et commun, celui-lui d'un étouffant huis-clos impulsé par une femme égocentrique et névrosée qui ne s'est jamais remise d'un mariage malheureux.
Jeune fille très courtisée et promise à un bel avenir, elle a écarté ses nombreux et sérieux prétendants au profit d'un séduisant employé, jouer et buveur, qui a tôt fait de prendre la poudre d'escampette en la laissant sans le sou avec deux enfants.
Mère pratiquant une affection maternelle ambivalente, elle oblige son fils aîné, guetté par l'atavisme paternel, à subvenir aux besoins de la famille et tente de caser sa fille handicapée, mentale ou physique rien n'est véritablement précisé, mais certainement handicapée sociale par une timidité maladie et la peur de l'autre. La seule solution reste le mariage mais encore faut-il trouver le "prétendant".
Par son excès de didactisme et de procédés métaphoriques, la proposition de Daniel Jeanneteau pour le moins divise si elle ne convainc pas. Ainsi, il érige en préambule, dit par le fils-narrateur (Olivier Werner) la didascalie introductive de la partition qui précise qu'elle se passe se situe au niveau mnésique et qu'elle traite de la vérité sous le masque de l’illusion qui désamorce toute la primeur de la découverte par le spectateur en lui imposant une clé de lecture.
De même, il reproduit le dispositif scénique prévu par Tennessee Williams - un empilement de rideaux transparents - pour créer une boite scénique blanche au sol mou, là encore métaphore de la chambre mentale et d'image floutée, dont l'artificialité et le caractère simpliste ne séduisent pas.
Par ailleurs, le texte français, dans la traduction non recontextualisée de Isabelle Famchon, comporte quelques regrettables anachronismes et bien que resserré, le spectacle dure néanmoins près de deux heures en raison d'un parti-pris d'analogie entre rêve et altération de la scansion d'où un rythme extrêmement lent, voire soporifique, les répliques étant parfois dispensées mot par mot.
Et, cependant, au jeu, Solène Arbel, qui campe avec une juste gravité la fille, et Pierric Plathier, excellent dans le rôle de l'invité, partagent une belle justesse de jeu.
Quant à Dominique Reymond, comédienne au sommet de son art, elle surjoue la théâtralité du personnage de la mère et se livre à deux numéros d'acteur qui constituent de véritables moments de comique d'anthologie quand, Madame Butterfly en kimono elle implore son fils de ne pas les abandonner et lorsque le soir de la venue du prétendant, elle se déguise en petite fille minaudante rappelant les enfants-star du cinéma hollywoodien de l'entre deux guerres mondiales. |