Monologue dramatique d'après un texte de de Svetlana Alexievitchdit par Coralie Emilion-Languille dans une mise en scène de Laure Roussel.
Valentina était une jeune fille au coeur simple qui rêvait d'amour. Elle a réalisé son rêve et a été heureuse jusqu'en 1986 quand son mari a été réquisitionné pour faire partie du contingent des "liquidateurs" chargés d'isoler et de nettoyer la zone contaminée par l'explosion de la centrale nucléaire de Tchernobyl.
Trois décennies se sont écoulées depuis la première catastrophe nucléaire classée accident majeur, la seconde sera Fukushima en 2011, la plus haute gravité dans l'échelle de gradation établie par l'Agence internationale de l'énergie atomique, et au regard de la mémoire de poisson rouge de l'homme contemporain et de l'inculture généralisée, qui s'en soucie encore, voire connait simplement son nom.
Alors même que la sécurisation du site n'est toujours pas achevée, que le nombre des victimes par contamination directe atteint le million et que des millions de personnes vivent sur des terres contaminées. Sans évoquer les conséquences à long terme du nuage radioactif qui a fait deux fois le tour de la Terre mais qui heureusement, selon les sommités françaises de l'époque, dont l'éminent directeur du Service central de protection contre les rayonnements ionisants, a contourné l'Hexagone.
En 1997, la journaliste russophone d'origine biélo-ukrainienne Svetlana Alexievitch, distinguée en 2015 par le Prix Nobel de littérature pour l'ensemble de son oeuvre, publie "La Supplication.Tchernobyl, chroniques du monde après l'Apocalypse" qui regroupe le témoignage de survivants et de proches de ceux qui sont morts parce que "Un événement raconté par une seule personne est son destin. Raconté par plusieurs, il devient l’Histoire".
Valentina est l'une d'entre eux et elle a survécu à la mort de son mari après une longue et lente agonie invalidante et douloureuse, abandonnés de tous, même des médecins, relégués dans l'oubli par la peur, le déni et l'impuissance.
Il a quitté le monde des vivants pour celui des "tchernobyliens", ceux qui n'ont pas eu la "chance" des "nettoyeurs" du premier cercle, surnommées les "chats du toit", travaillant sur le site, sans protection et quasiment à mains nues, pour remplacer les robots mécaniques dont les circuits électriques étaient endommagés par les radiations, qui se sont très vite consumés.
Dépourvu de pathétisme comme de révolte, son récit mémoriel clair et limpide, mais extrêmement violent et bouleversant par cela-même, est porté avec sobriété et justesse par Coralie Emilion-Languille sous la direction de Laure Roussel.
La publication de "La supplication" a, en son temps, secoué l'opinion internationale. Mais le temps passe et il est nécessaire de faire des "piqures de rappel", telle cette "Valentina-Tchernobyl", pour que la vie ait encore un avenir. |