Le Musée national de Port-Royal-des-Champs sis à Magny-les-Hameaux à proximité de Versailles et sur le domaine de l'ancienne Abbaye éponyme, haut lieu historique de la controverse janséniste du 17ème siècle, et dédié à son histoire, propose, sous le titre "Rosa Bonheur et sa famille - Trois générations d'artistes" une exposition aussi bucolique qu'inattendue.
Organisée avec la Réunion des musées nationaux et le soutien du Musée des Beaux-Arts de Bordeaux et du Musée national du château de Fontainebleau, et sous le commissariat de Philippe Luez, conservateur général du patrimoine et directeur du musée précité, et Chloé Ariot, conservatrice du patrimoine, elle est consacrée à la peinture et à la sculpture animalière, qui connait son apogée au 19ème siècle avec le courant naturalisme, telles que pratiquées par les membres de la famille Bonheur implantée dans ce village rural.
Les Bonheur dans le pré
La famille Bonheur pratique l'art d'après nature. Il y a le père, Auguste, musicien, professeur de dessin et modeste peintre paysagiste qui initie tous ses enfants à la pratique artistique.
Ensuite, les fils Auguste, peintre de paysages grandioses et peintre animalier, et Isidore, sculpteur animalier dans la veine de Antoine-Louis Barye et réputé pour son sens de la composition notamment de scènes de combat ("Chasse au biso", "Vache défendant son veau contre un loup")
qui va fournir le fondeur d'art François Auguste Hippolyte Peyrol qui a épousé sa deme-soeur Juliette, elle-même peintre.
Mais la "star" de la famille est la fille Rosa Bonheur. Ambitieuse, pragmatique et dotée d'un caractère bien trempé, elle n'entend pas pratiquer les arts d'agrément réservés à la gent féminine de son temps mais elle rêve de célébrité et de l'indépendance financière indispensable corollaire de la liberté nécessaire à un choix de vie "féministe".
Si elle commence par des paysages et s'essaie à la sculpture, sa peinture animalière et ses scènes agrestes, "Le Labourage nivernais" ici présenté, et le monumental "Marché aux chevaux", produit en esquisse, lui valent tant la reconnaissance critique au Salon officiel que le succès commercial auprès de la société bourgeoise notamment anglaise et américaine.
Ce qui décide de son orientation dans un créneau où la concurrence est moindre et va se consacrer essentiellement à des peintures décoratives de commande pour une clientèle fortunée.
Son oeuvre, mise en résonance avec celle du prédécesseur Jacques Raymond Brascassat, qui fut par ailleurs le précédent propriétaire de la fameuse maison des Bonheur, se compose de représentations figuratives d'animaux exécutées "avec la patiente exactitude d'un Flamand et la propreté d'une Parisienne" disent certains critiques et de scènes de genre, le paysage animé, appréhendé, comme la peinture d'histoire, en grand format .
Entre la mièvrerie pastorale et le naturalisme compassionnel pratiqués par ses homologues, elle ressort à un troisième registre, celui du pittoresque idéalisé et de l'hymne au travail des champs que d'aucuns rattachent à sa culture philosophique et religieuse.
A découvrir donc dans le cadre d'une promenade au long cours au sein d'un vaste domaine forestier abritant les ruines de l'abbaye, la ferme des Granges et le fameux " Puits de Pascal" reconstruit au 19ème siècle, un verger et accueille un ensemble de jardins pédagogiques et d’évocation. |