Tragédie de Jean Racine, mise en scène de Stéphane Braunschweig, avec Dominique Blanc, Stéphane Varupenne, Clotilde de Bayser, Laurent Stocker, Hervé Pierre, Georgia Scalliet, Benjamin Lavernhe, Théo Comby-Lemaître, Hugues Duchêne et Laurent Robert.
Voir Racine au Français ! L’exaltation commence le matin, monte l’après-midi : c’est un rendez-vous d’amour.
Britannicus, jeune homme impétueux, s’est vu ravir le trône par son demi-frère Néron, après l’empoisonnement de son père par sa belle-mère, la vipérine Agrippine. Lorsqu’ils tombent amoureux de la même jeune fille, Junie, le drame s’enroule autour des deux garçons.
Un traître ami, Narcisse, la folie de pouvoir de la vieille souveraine, ivre de sa toute-puissance présumée et Britannicus périt empoisonné par Néron, tandis que Junie échappe au jeune homme. Au milieu des décombres, Agrippine gémit lamentablement. La journée s’achève.
Œuvre essentielle du grand dramaturge, emblème du génie national, "Britannicus" porte haut la langue française. Chacun en connait quelques vers, vibre d’émotion. Impossible de décevoir.
Stéphane Braunschweig, metteur en scène indiscuté, a choisi un décor et des atours contemporains. Cette pratique ne choquera plus. Agrippine est costumée en vendeuse de parfumerie "chic" de province, veste et pantalon noir, les garçons parés pour une bière "sortie de bureau".
L’essentiel est ailleurs. Le travail de la langue, du vers, est simplement magnifique. On oye Racine, comme rarement. Diction parfaite, rythme, valorisation du texte par rapport à l’émotion, retenue. La perfection et l’ébaudissement.
Bien sûr, on vient aussi pour voir "La Blanc", nouvelle recrue de la Comédie-Française, qui endosse la toge (imaginaire) d’Agrippine. Essai réussi. Dominique Blanc donne gouaille, voracité, monstruosité à son personnage. Son métier exsude. Elle ose jouer jusqu’au bout ce reptile trop confiant dans ses poisons éventés.
On remarque, dans leurs apparitions, Théo Comby-Lemaître, Hugues Duchêne et Laurent Robert, tandis que Clotilde de Bayser incarne une belle Albine, suivante et que Benjamin Lavernhe est vénéneux à souhait dans le rôle du fourbe Narcisse.
Georgia Scalliet déçoit un peu, cette fois, dans une Junie un peu chevrotante, tandis qu’Hervé Pierre est Burrhus, très puissant. Mention spéciale à Laurent Stocker, inventeur d’un Néron introverti et immature, cuiseur de rancunes.
Enfin, Stéphane Varupenne, merveilleux comédien, triomphe dans le rôle-titre, apportant sa fougue et sa sensibilité à ce "Britannicus".
Un classique non pas "revisité" mais visité, simplement, par la grâce. |