Atmosphère grise et chaleur lourde sont au rendez-vous pour cette édition 2016 du Fnac Live qui se tient depuis 2011 au pied de l'Hôtel de Ville de Paris. Mais suite aux attentats de Nice du 14 juillet, la question qui se pose à l'ouverture, en ce mercredi 20 juillet, est celle de la fréquentation. Déjà l'année dernière, les contrôles à l'entrée du parvis avait été renforcés. 130.000 spectateurs avaient cependant assisté à l'édition 2015.
C'est Bon Voyage Organisation qui les premiers entrent en scène. La première fois qu'on avait entendu parler de Bon Voyage Organisation, c'était pour la Route du Rock collection hiver 2016. Certes, ils avaient déjà sorti un EP intitulé XinGyè depuis plusieurs mois sur le label de La Femme, mais leur disco tropicaliste n'était pas parvenue jusqu'à nos oreilles. Au Francofolies de La Rochelle, ils ont cette année travaillé avec les Brigitte sur un spectacle de reprises de Daniel Balavoine qui reçut un accueil mitigé. La Femme, Brigitte, Balavoine... peu de noms qui trouvent grâce à mes oreilles. Adrien Duran, bassiste et compositeur du groupe, peut se reposer sur Julien à la flûte et au saxophone pour habiller les morceaux et sur Lucie à la voix qui n'hésite pas à prendre le leadership en scène. "Love soup", à défaut d'être un tube, a les atours d'une agréable pop easy listening qui, en énumérant des noms de destinations lointaines et ensoleillées, invite au voyage. Très agréable surprise en raison d'une rythmique bien plus présente que sur disque qui donne du piment aux morceaux.
Le duo israélien Lola Marsh est apparu sur les radars au début de l'année avec un EP contenant de jolies pépites pop folk. Signés chez Anova, le duo formé il y a 5 ans commence à percer à l'international. La voix éraillée de Yael y est pour beaucoup, mais ce serait ignorer la production et les montées mélodiques orchestrées par Gil comme sur le single "You're mine". Dès le second morceau, le public tape dans ses mains, puis aussi ensuite pour "You're mine". En effet, comme pour Bon Voyage Organisation, le groupe muscle ses morceaux pour la scène en étant accompagné de trois musiciens additionnels. Yael, la chanteuse, au ukulele ou à la guitare n'hésite pas à établir le contact avec la foule qui se fait plus dense devant la scène. Apercevoir des spectateurs des premiers rangs qui connaissent les paroles de leurs chansons leur donne une énergie supplémentaire. Dans la lignée de The Dø plus que de Lana del Rey à laquelle on les compare souvent, on prédit de beaux jours au duo.
Je ne comprends toujours pas le succès de Feu! Chatterton. Tout me semble avoir été pompé sur le groupe Tanger, en gommant les aspérités musicales du groupe des années 90, qui ajoutait à son rock une touche de prog rock et de free jazz. Donc, je choisis logiquement de me diriger vers les salons de l'Hôtel de Ville pour le concert de Vincent Delerm.
Comme souvent avec Delerm, des voix préenregistrées viennent souligner les interludes. En entrée de scène, il se moque gentiment du lieu, rappelant les grands moments de l'ère Tiberi.
Très rapidement, il rend hommage à William Sheller, obligé d'interrompre sa tournée pour raisons de santé et qu'il remplace au pied levé. Il explique que Sheller fut l'un des premiers chanteurs dont il avait acheté un disque à la Fnac de Rouen. Le concert est essentiellement composé de morceaux anciens. Je quitte à regret les somptueux salons de l'Hôtel de Ville alors que Vincent Delerm termine "Il fait si beau" car je dois interviewer Lola Marsh. Néanmoins, comme toujours, le concert de Vincent Delerm est très intelligemment mené.
Jain, vue au festival Beauregard quelques semaines auparavant, m'avait soufflé par son professionnalisme et sa capacité à tenir la scène. Seule en scène, elle va chercher le public, repart vers son ordi pour lancer des boucles, revient vers l'avant de la scène, échange avec le public. Elle fout simplement le feu au Fnac Live avec des spectateurs qui participent, sautent sur place, chantent, tapent dans leurs mains sur tout le site jusque dans les derniers rangs.
Lorsqu'on voit sur les écrans la foule massée devant la scène jusqu'à l'entrée du site, on ne s'inquiète plus de la fréquentation. Le Fnac Live 2016 est déjà un succès.
La nouvelle chanson de Jain "Paris", déclaration de paix et d'amour à la capitale, est tout de suite adoptée par le public. Son premier album, Zanaka, produit par Maxime Nuccia alias Yodelice, a de nombreux fans dans le public, et son single "Come" est un énorme triomphe.
La jeune femme de 24 ans a beaucoup voyagé, Pointe-Noire, Dubaï, Abu Dhabi... Il en ressort une musique world qu'elle lie d'une part grâce à ses boucles électro et d'autre part en les saupoudrant à la sauce mondiale de l'entertainment R'n'B / funk / hip-hop qui sortent des usines à tubes à la Denniz Pop, Max Martin et Dr. Luke.
Efficace, mais soufflant néanmoins un vent de fraîcheur sur Fnac Live, Jain montre qu'elle sait mener sa barque même si c'est en surfant sur le public dans une sorte de boule de hamster transparente qu'elle termine son spectacle.
Lilly Wood and the Prick font chavirer le public. Tout comme pour Feu! Chatterton, je ne m'explique pas cet enthousiasme. Certes, il y a de mignons refrains durant leur concert, mais rien n'y fait, je reste en-dehors de la fête et de la danse. De plus, Nili Hadida habillée d'un t-shirt Adidas court et d'un fuseau aux motifs horribles qu'on ne porterait pas pour faire ses courses chez Leader Price, n'aide pas à donner visuellement du charme au groupe. Je laisse les spectateurs à leur joie et attend patiemment Jungle.
Découverts sur scène en 2015, Jungle s'était révélé être une vraie claque. Le groupe est groovy, soul, festif sans cependant être vintage. Ce sera en se tournant vers Kid Loco, Morcheeba ou Groove Armada qu'on trouvera des équivalents aux londoniens de Jungle. Josh Lloyd-Watson et Tom McFarland sont en milieu de scène, à la guitare, aux voix et aux claviers et samplers, deux choristes les entourent, tandis que la section rythmique composée d'une basse, une batterie et des percussions assure en fond de scène. A côté de moi, Yael de Lola Marsh qui aime beaucoup le groupe, apprécie de les découvrir sur scène pour la première fois. Les sept musiciens, jouent en une heure quasiment l'intégralité de leur premier album. Fin, professionnel et dansant, le groupe offre, à mon goût, la plus belle prestation de cette journée d'ouverture.
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