"A ces anonymes, ces femmes, ces hommes, ces prisonniers, chantant sur les digues du Mississippi, dans les geôles, dans les champs, dans tous ces endroits improbables et inventant une musique populaire, porteuse d’humanité."
Atlas, le mec qui portait le monde sur ses épaules. Voilà à qui m’a fait penser cette dédicace. Existe-t-il une musique plus chargée d’histoire et de larmes que le blues ? Prison’s blues respire l’originel, le solennel blues voix du chagrin, de l’espoir, de l’humanité. Chantal Laxenaire s’est entourée de son gang, composé d’Eric Legrand, Freddy Holleville et Jean-Pierre Fourment pour ressusciter ces titres enfouis.
Les uchronies disent-elles ce qu’il serait advenu du blues si l’homme blanc n’avait pas eu soif d’espèces sonnantes et trébuchantes ? Je me demande si le respect qu’inspire le blues ne vient pas de là. Né dans les champs de coton, sorti de la gorge d’esclaves restés dignes jusqu’au bout, magnifié par des voix mélancoliques et des souvenirs perdus, le blues résonne dans nos âmes comme un hymne universel à la folie des hommes.
Prison’s blues, onze titres, onze retours dans le passé, onze histoires puissantes à crever. Chantal Laxenaire & the gang réussissent à transcender les époques et à porter la conquête de l’ouest dans mon saloon… hum, de mon salon je voulais dire. Ce que je sais c’est que je n’en sais rien, je ne sais rien des sentiments qui ont habité les années blues du commerce triangulaire au Ku-Klux-Klan. Et maintenant… Restent les enregistrements et les voix vibrantes des chanteurs aux coffres impressionnants d’émotions.
Les seuls qui n’ont pas besoin d’en faire des caisses, qui n’ont besoin ni de paillettes, ni de spots pour briller, ce sont les artistes blues. Hommes ou femmes, peu importe. Tout devient évident en les écoutant, la lumière au bout du tunnel, le calme après la tempête, la nostalgie et le souffle de vie, il vient de là, il vient du blues…
De la guitare qui n’en peut plus de gémir sur "Rolled and Tumbled", de la douceur veloutée de "It’s better to be born lucky", de la contrebasse jazzy-sexy de "Worried mind", de la corde qui se déhanche dans son fourreau rouge corbeau de "Strange man", de la guitare électrisée de "Five long years", des silences recueillis de "Prison Blues"… L’histoire du blues dans Prison’s blues.
Avez-vous déjà remarqué comme un feu de bois hypnotise les regards ? A quel point le feu fascine notre inconscient collectif ? Comme si nous partagions toujours le sentiment du premier préhistorique qui se fit griller une côtelette ? Le blues parle au même intérieur. Avez-vous remarqué les pauses silencieuses d’une salle bondée quand trois notes de blues passent au-dessus de nos têtes ? Nous portons en nous la subtile harmonie de cette musique ancestrale.
Un album qui rend poète, donne des envies de pardon et de voyages dans des coins isolés, des chants qui puisent leur énergie aux sources de la passion, une musicalité qui fait vibrer plus d’un auditeur averti… Il en faut peu pour être heureux, un peu de blues et de verdure.
Avec la mort de Lynch, c'est un pan entier de la pop culture qui disparait, comme ça, sans crier gare. Il reste de toute façon sa filmographie qui n'a pas attendu sa mort pour être essentielle. Pour le reste, voici le sommaire. Retrouvez-nous aussi sur nos réseaux sociaux !