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Théâtre Paris-Villette  (Paris)  novembre 2016

Comédie dramatique d'après le film éponyme de Yasujiro Ozu, mise en scène Dorian Rossel, avec Rodolphe Dekowski, Xavier Fernandez-Cavada, Delphine Lanza, Yoshi Oïda, Fiona Sanmartin et Elodie Weber.

Depuis quelques années, l'idée de transformer des films en pièces de théâtre n'a cessé de gagner du terrain. En général, le résultat est inversement proportionnel à l'intérêt des œuvres et l'on constate qu'il est plus difficile de réussir à adapter sur scène un grand classique du septième art qu'un film sans réputation.

C'est donc avec une évidente appréhension qu'on s'apprête à voir porter à la scène "Voyage à Tokyo", l'un des chefs d'oeuvre du cinéma nippon et sans doute le plus emblématique des films de Yasujiro Ozu.

On peut même penser que ceux qui connaissent son style si particulier, composé de plans fixes souvent filmés à hauteur du sol, vont trouver le défi insurmontable. Ils seront donc plus agréablement surpris par la copie fournie par Dorian Rossel qui s'est sorti admirablement du piège zen tendu par Ozu avec cette histoire de parents campagnards qui viennent visiter leurs enfants à Tokyo.

D'abord, on soulignera un grand plus : il n'utilise jamais de vidéo et reste très proche de la structure narrative d'Ozu et de son scénariste complice Kogo Noda. Dans ce cinéma très formel, on parle finalement très peu, mais les dialogues sont d'une grande qualité d'écriture qui leur permet de passer la rampe et d'être utilisés sans l'image.

Ici, Dorian Rossel a astucieusement remplacé les célèbres plans d'Ozu par des bruitages ou par l'utilisation de la musique jouée en direct par Alex Muller Ramirez et Immanuel de Souza.

Autre problème formidablement résolue par Dorian Rossel : celui concernant les acteurs et leur jeu. Si l'on connaît le cinéma d'Ozu, on n'ignore pas qu'il utilise les meilleurs de son pays, avec à leur tête Chisahu Ryu, son quasi-double, et qu'il lui faut des dizaines de prises pour lui faire atteindre ce naturel qu'il cherche au-delà de l'artifice.

Dorian Rossel s'est ainsi entouré d'acteurs de grande qualité et a confié le rôle du père interprété par Ryu au seul Japonais de la troupe, Yoshi Oida. Âgé de 85 ans, vivant et travaillant en France, ce théoricien du théâtre est, à sa façon, lui aussi une légende. Avec son délicieux accent japonais, ses petits pas faussement gauches, son penchant pour la boisson, il incarne parfaitement le vieux père.

Face à lui, les acteurs français jouent "normalement" les Japonais des années cinquante. Rodolphe Dekowski, Xavier Fernandez-Cavada, Delphine Lanza, Fiona Sanmartin, Elodie Weber, appelés à jouer plusieurs personnages, prennent, comme le spectateur, un grand plaisir à se transformer et à endosser les costumes d'Amandine Rutschmann, qui a su donner n petit quelque chose de japonais même aux tenues occidentales.

Comme dans les films d'Ozu, tout le monde est souriant et affable, mais peut s'emporter pour des questions d'argent et révéler des traits de caractère désagréables (avarice, fainéantise, jalousie...).

Autre parti-pris réussi du metteur en scène, il n'a pas joué de l'épure à l'épure, et si le subtil décor de Clémence Kazémi, Sybille Kössler et Manon Fantini restitue une ambiance japonaise, elle se garde du réalisme, avec au sol une série des structures en bois noir parallèles sur lesquels les personnages se tiennent debout, peuvent s'assoir, voire se coucher entre l'espace qui les sépare.

Contrairement à ce que pensent ceux qui n'ont pas pénétré l'univers d'Ozu, le grand maître n'était ni austère ni ascète. Dorian Rossel a donc raison de parsemer son "Voyage à Tokyo" de petits détails drôles. Ainsi, il n'hésite pas à faire jouer une ménagère japonaise par un homme, alors que les enfants sont représentés par des petites pancartes, tenus par les autres personnages, avec d'un côté un visage souriant et de l'autre des traits colériques ou des onomatopées.

Cet ajout d'une petite touche manga n'empêche nullement d'être vraiment dans l'univers d'Ozu, qu'on pourrait comparer à celui de Pagnol, mais où il n'y aurait pas besoin de passer par le mélodrame. Les petits sentiments familiaux débouchent sur les grandes questions humaines et c'est à une leçon de vie que l'on est confronté lors de cet ultime voyage où s'estompe une génération.

On avait émis des réserves sur son adaptation de "La maman et la putain" de Jean Eustache, réintitulée "Je me mets au milieu mais laissez-moi dormir". Cette fois-ci, on les écartera toutes pour applaudir le travail de passeur de Dorian Rossel qui, avec son "Voyage à Tokyo", devrait donner envie à bien des spectateurs de voir ou de revoir les admirables films de Yasujiro Ozu.

 

Philippe Person         
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