Comédie dramatique de Harold Pinter, mise en scène de Mitch Hooper, avec Delphine Lalizout et Olivier Foubert.
C'est dans le salon de Richard et de Sarah que tout va se passer. Lui, c'est le mari, elle, c'est la femme. Entre eux, de l'amour et de l'ennui. Du temps passé ensemble et du passé tout court.
Entre eux, il y a Harold Pinter, qui a écrit cette pièce adaptée d'un téléfilm écrit pour sa femme Vivien Merchant.
Jamais le mot "non-dit" n'aura eu autant de sens dans ce moment banal qui va s'avérer singulier. Car Richard part travailler comme tous les matins et lance une phrase rituelle : "Ton amant, vient aujourd'hui ? " à laquelle Sarah répond traditionnellement : "Oui ". Quand il revient du travail, quelques heures plus tard, elle lui confirme sa venue en partageant un whisky avec lui.
On pourrait en rester là, dans une répétition perpétuelle de ce couple à perpétuité. Mais, dans une seconde partie, Sarah quitte ses vêtements sans intérêt de simple ménagère pour revêtir une robe d'un rouge percutant qui fait d'elle une créature plantureuse et sexy.
Car l'amant va rentrer en piste et la surprise est totale : à l'exception du port d'une casquette qui le rend vaguement canaille, l'amant est le portrait craché du mari...
Dès lors, "L'Amant" prend une direction imprévue, d'autant que le jeu ne semble plus amuser le mari... jaloux de lui-même.
Il faudra être attentif aux mots prononcés par les deux protagonistes et à la manière dont ils les prononcent pour tirer le suc de cette tragi-comédie conjugale aux accents beckettiens. Sous la houlette de Mitch Hooper, fin connaisseur du Maître anglais, Delphine Lalizout et Olivier Foubert s'adonnent à cette partie subtile de non-dits.
Ce qui, raconté, pourrait paraître un jeu long, répétitif et vain, prend sur scène l'allure d'un suspense quasi-hitchcockien dont il ne faudra pas - tout de même - attendre qu'il se résolve par un coup de théâtre.
Dans un décor de meubles clairs, la maison paraît lumineuse et cet enfermement volontaire d'un couple autarcique prend une force inattendue. |