Comédie dramatique de Nathalie Sarraute, mise en scène de Léonie Simaga, avec Nicolas Briançon, Nicolas Vaude et Roxana Carrara.
Transposée sur scène, la pièce radiophonique "Pour un oui ou pour un non" de Nathalie Sarraute ressortant au théâtre de mots constitue une formidable machine à jouer.
Et, sous la direction au cordeau de Léonie Simaga, Nicolas Briançon et Nicolas Vaude pratiquent l'exercice avec l'éloquence sensible de comédiens aguerris et une perceptible délectation.
Articulée autour d'une locution adverbiale synonyme tant de broutille que de puérilité, la partition s'ordonne en un échange subtil sur deux plans. Ainsi, elle explore les chausse-trappes du langage, du dit et du non-dit, de l'indicible et de l'implicite, et surtout de la prosodie qui engendre le ressenti.
Simultanément, elle procède au décryptage de l'amitié en ce qu'elle implique d'investissement affectif et d'exigence et, en l'espèce, à la résolution, voire la consolidation, d'une fâcherie entre deux amis de longue date née d'une maladresse de l'un mal interprétée par l'autre qui a pris ses distances.
Par ailleurs, elle s'avère hybride car, par sa construction, un format court en forme de ping-pong verbal dépourvu de scène d'exposition et d'ancrage spatio-temporel, et non exempt d'un certain humour loufoque, conjuguant gravité et humour, elle évoque "Les Diablogues" de Roland Dubillard et, par ses assauts nimbés de mauvaise foi, la scène de ménage à la Courteline.
Dans un décor "white cube" de Massimo Troncanetti qui sied à la situation, Nicolas Briançon campe un homme dans une maturité sereine et épanouie qui veut comprendre et récuse l'accusation adressée par Nicolas Vaude, dont le physique juvénile et le verbe fébrile sied au personnage inaccompli au narcissisme fragile qui laisse planer le doute entre le ressentiment exacerbé et la stratégie de se déprendre de l'autre.
Experts également du jeu non verbal, ils délivrent une prestation jubilatoire qui se clôt par un épilogue laissant ouvert le champ d'interprétation sur la nature réelle du malentendu, lequel, rétrospectivement, impacterait sur la réalité de cette amitié qui pourrait être née d'une méprise, et esquisse la possibilité d'une impasse, voire d'un rebondissement, ludique. |