Spectacle conçu et interprété par Michel Hermon accompagné au piano par Christophe Brillaud.
Le comédien et chanteur Michel Hermon propose un "revival" du légendaire tour de chant, considéré comme libertaire et insurrectionnel, d'une figure majeure de la chanson française, Léo Ferré, dispensé en 1969 à Bobino, auquel il a assisté au temps exalté de ses vingt ans. Son récital ne ressort ni à l'hommage hagiographique, ni au théâtre musical, ni à la reconstitution mimétique d'autant qu'il n'en n'a pas les stature et tessiture.
Dans une forme piano-voix, à l'exception de quelques titres dispensés sur la bande-son de l'orchestration originale, Michel Hermon se fait passeur passionné, mettant son pas dans les pas de son père de sensibilité artistique, accompagné par le pianiste à l'écoute attentive Christophe Brillaud qui en signe les roboratifs arrangements.
"Léo Ferré/Bobino 1969", ce sont vingt-six titres, pourl'essentiel écrits en cette année, dont l'emblématique éblouissement de "C'est extra", l'émouvant "Pépée" et la sublime dédicace à la femme de "A toi", et des mises en musique de l'excellence de la poésie française saturnienne avec Baudelaire ("Spleen"), Verlaine ("Ame, te souvient-il ?"), Rimbud ("Les Assis") et Apollinaire ("Marizibill).
Michel Hermon en respecte la play-list, d'une dramaturgie secrète, indique-t-il dans sa note d'intention, qui n'échappera pas aux fidèles de Ferré et avec entracte, qui s'ouvre avec "L'idole" et se clôt par "Ni Dieu ni Maître", ode à l'artiste et à l'anarchiste, et la dispense sans intermède, commentaire et décor, simplement nimbé des lumières crépusculaires de Olivier Foy.
En cette année post-Mai 68, le viatique musical de Ferré, c'est toujours la ville nocturne des compagnons d'enfer, les gueux ("Madame la misère") et les femmes, les frangines d'amour ("La nuit") qui errent dans les nuits glauques ("Rotterdam"), l'année érotique avec les filles de la banlieue ("La banlieue"), les fragiles fleurs de bitumes et les putains magnifiques.
Mais aussi, dans la lignée de précédents opus tel "Ils ont voté", ses apostrophes engagés délivrés à chaud ("L’été 68", "La Révolution") d'une hallucinante résonance contemporaine.
Interprète sensible et puissant, Michel Hermon séduit, transporte, incarne et convainc avec une bienvenue sobriété qui évite le lyrisme emphatique du chant ferréien et se concentre sur la force du verbe.
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