Il est écrivain des Premières Nations, les peuples autochtones canadiens. Connu et reconnu, romancier, nouvelliste et scénariste, Thomas King accorde une nouvelle plume à son arc et offre La femme tombée du ciel, distingué par le prix du Gouverneur général en 2014. Allez hop, en lecture.
Entre conséquences écologiques et abstinence de merveilleux, le roman est un triste fouilli de repentir et de deuil. Le récit se déroule sur une côté de Colombie Britannique, désertée de ses touristes, de ses habitants et de ses richesses marines suite à l’épandage d’une substance killeuse de nature, un défoliant chimique ultra décapant.
Sans transition, le roman file dans la folie suicidique de Gabriel, il se rêve noyé dans les eaux polluées. Nous apprenons plus tard qu’il est le malheureux créateur de la molécule mortelle, et que ses patrons n’ont pas entendu son appel pour épargner les tortues. Sa tristesse dépressive se fond parfaitement au décor figé du village côtier où il cuve sa culpabilité.
C’est là qu’il rencontre Mara, sorte de sirène optimiste, gardienne des souvenirs et des maisons abandonnées datant de l’époque fructueuse où les touristes se bousculaient pour voir le ballet des tortues trop mignonnes swinguant vers les vagues. Elle le sauvera de lui-même.
Perdu entre les ellipses temporelles non nommées et les personnages sans lien évident, ce n’est qu’à la seconde moitié de la lecture que vous vous rendrez compte que le roman a démarré depuis un moment et qu’il s’agit bien plus qu’une lutte pour la survie des espèces, plutôt qu’un morne discours funéraire.
Parce que l’auteur a su doter tous ses personnages d’une pudeur discrète et raffinée. Ce n’est qu’à mots couverts que les autochtones parlent de "la Ruine", ce jour maudit qui flingua l’écosystème des lieux, c’est dans des exubérants palaces vides de sentiments que le PDG de Domidion noie sa culpabilité, c’est avec insolence que Mara pousse Gabriel hors de sa léthargie coupable. Et c’est finalement avec une force insoupçonnée que la nature reprend ses droits, vainquant les erreurs de ses humains parasites.
Un roman riche d’enseignements, qui donne sa voix aux combattants pour la sauvegarde de la planète, au-delà des performances financières et des manipulations de protéines. La femme tombée du ciel est aussi un cheminement de résilience humaine et naturelle. |