Every Country's Sun
(Rock Action Records) septembre 2017
Un lien assez spécial mais indéfectible m’unit à Mogwai. Leur premier album, Young Team, fut la bande son de mes premiers émois sexuels avec ma petite amie de l’époque. Ce n’est pas très glamour, je vous le concède mais ces accélérations soniques, cette façon de manier les tensions et les détentes (la formule calme / violent / calme / explosion), n’est-ce pas d’un certain côté très "érotique" ?
Bref, comme un vieux couple, Mogwai et moi avons connu des périodes d’amour absolu (Come On Die Young (1999), Happy Songs For Happy People (2003), Hardcore Will Never Die, But You Will (2011)) et périodes plus mornes (Rock Action (2001), Mr Beast (2006), The Hawk Is Howling (2008), Les Revenants (2013), Rave Tapes (2014)) où l’on ne se comprenait plus trop. L’habitude ayant remplacé depuis quelque temps la passion. Et depuis franchement j’attends ce disque qui rallumera la flemme, l’étincelle qui fera boom !
Pour filer la métaphore, disons que ce Every Country’s Sun, l’âge aidant peut-être, n’occasionnera pas une passion débordante, se partageant entre grands moments et passages plus… anecdotiques. Produit par Dave Fridmann (déjà aux manettes de Rock Action) et sans le guitariste fondateur John Cummings, cet Every Country’s Sun voit le nouveau Mogwai (plus électronique depuis Rave Tapes en 2013 grosso modo) embrasser l'ancien à l’intensité sonique, presque Krautrock, noise. Un pied dans les deux camps, mélangeant sans effort l'organique avec l'électronique. Synthèse musicale ouvrant de nouveaux espaces.
Le départ de Cummings offre l’opportunité de changement, que Fridmann saisit intelligemment. Moins dépendant des guitares, mais pas de la basse puisque Dominic Aitchison trouve une place plus centrale, Mogwai s’offre des plages plus électroniques, plus texturées mais aux nervures moins claustrophobes, sans perdre en profonde noirceur, où tout se cache dans les détails et dans une certaine subtilité. Exemple avec "Party in the Dark", peut-être la chanson la plus pop de Mogwai mais pas forcément la plus intéressante, avec sa ligne de basse mise en avant rappelant New Order, cette brume psychédélique et ce chœur euphorique : "Hungry for another piece of mind". Mais c’est vers des titres comme "Don’t Believe The Fife", "Old Poisons", "AKA 47", "1000 Foot Face" ou "Every Country’s Sun" qu’il faudra trouver un vrai mouvement, une impulsion vers l'avant et de nombreuses idées nouvelles.
Sans être absolument transcendant mais portant son lot d’excellents moments, ce disque est un pas en avant, une nouvelle pierre à cet édifice aussi bien remarquable qu’incroyable qu’est la carrière de Mogwai.